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obtenir qu’une partie des renforts arrivés après le combat fussent lancés à la poursuite des débris de l’armée péruvienne. Ce ne fut que le lendemain que le général Escala autorisa enfin le colonel Sotomayor à quitter Dolores et à entrer en campagne. Renseigné sur la marche de Buendia, Sotomayor occupait l’ouverture de la vallée au moment même où l’avant-garde péruvienne venait de la franchir. Buendia, acculé, privé de la meilleure partie de ses troupes, surpris en outre à l’improviste, allait être obligé d’accepter le combat dans les conditions les plus défavorables. Il semblait perdu ; ses soldats et lui n’avaient plus qu’à lutter en désespérés.

A huit heures du matin, Buendia, rassuré sur le sort de son avant-garde, qui n’avait pas rencontré l’ennemi, se préparait à lever le Camp de Tarapaca et à donner l’ordre du départ quand on signala la présence d’une colonne chilienne. Commandée par le lieutenant-colonel Vergara, elle avait gagné dans la nuit les hauteurs qui dominaient Tarapaca au nord. Couronnant ces crêtes, elle se préparait à aborder celles du sud, plus élevées, et à enfermer les Péruviens dans un cercle de feux. Pour gagner les mamelons du sud, la colonne chilienne devait redescendre dans le ravin et gravir les pentes opposées. Deux autres colonnes débouchaient également sur Tarapaca, remontant le cours de la vallée, dont elles fermaient l’issue. Surpris par cette attaque imprévue, Buendia expédia en toute hâte un messager pour transmettre l’ordre à son avant-garde de revenir à marches forcées sur Tarapaca. Escorté du colonel Suarez, il parcourut les rangs de ses troupes pour les encourager à la résistance ; leur attitude révélait une résolution froide, la conscience du danger, la hâte d’en venir aux mains et de venger sur l’ennemi les outrages de la fortune. Le premier choc fut terrible. Les bataillons péruviens se ruent sur la colonne chilienne, qui hésite et recule. Les deux autres avancent pour la soutenir, mais leur artillerie ne peut entrer en ligne, on se bat corps à corps ; les canons chiliens, pris et repris, sont démontés, les attelages tués. A une heure de l’après-midi, les Péruviens l’emportaient. Une charge de cavalerie chilienne permet à l’infanterie de reprendre haleine ; les rangs se reforment, le combat recommence. Départ et d’autre, on ne fait pas de prisonniers. Les troupes de Buendia commencent à plier, il donne l’ordre de battre en retraite ; mais, à ce moment même, la tête de colonne de son avant-garde débouchait sur le champ de bataille.

A la vue du renfort qui leur arrive, les Péruviens font volte-face et attaquent de nouveau l’ennemi, surpris par cette brusque offensive. Rejetés sur le village, les Chiliens s’embusquent dans les maisons, derrière les haies. Ils sentent que la victoire leur échappe, mais ils combattent avec énergie. Pour avoir raison de leur résistance, les Péruviens incendient les toits de chaume, qui s’écroulent