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budgets semblaient condamnés pour longtemps, rétablir son crédit et se préparer une situation financière satisfaisante.

C’est cette régénération des finances italiennes, laborieusement poursuivie pendant plus de dix années, que nous voudrions retracer. Nous avons déjà esquissé cette histoire[1] ; nous essaierons de la compléter à l’aide des documens officiels les plus récens et des renseignemens que nous avons pu recueillir en Italie.


I

Au premier rang des conditions indispensables pour avoir de bonnes finances, il faut incontestablement placer l’ordre dans les dépenses, la régularité dans les écritures, et le facile exercice, d’un contrôle sérieux de la part des représentans du pays. Les finances piémontaises avaient été conduites de tout temps avec sagesse et d’une façon presque paternelle ; mais ce budget, tenu soigneusement en équilibre, ne dépassait guère celui de la ville de Paris. Dans l’espace de dix années, des annexions successives ont étendu sur l’fia-lie entière l’autorité de la maison de Savoie : des guerres et des emprunts onéreux ont fait prendre aux dépenses un. accroissement hors de toute proportion avec celui des recettes. En même temps que les cadres qui avaient suffi au petit royaume de Sardaigne devenaient impuissans à administrer l’état démesurément agrandi, la force des événemens et l’urgence des besoins rendaient inapplicables les règles observées jusque-là. En face de l’ennemi et quand le sort de l’Italie était en jeu, on ne pouvait songer à restreindre la liberté d’action du gouvernement : il fallait lui laisser le choix des moyens en même temps que la tâche de se procurer l’argent nécessaire. Pendant cette période, l’histoire financière de l’Italie n’est guère que l’histoire des emprunts contractés sous toutes les formes, même sous celle de l’emprunt forcé ; le budget n’était qu’un cadre pour la comptabilité ; il ne pouvait être sérieusement discuté, et il se réglait invariablement par une addition à la dette publique. Cette situation n’a changé qu’après 1866, lorsque l’annexion de la Vénétie eut mis un tout à la fois à la période d’agrandissement et aux efforts extraordinaires que l’Italie s’imposait en vue de conquérir son unité.

Ce. ne fut point une tâche aisée que de soumettre à une administration uniforme et d’assujettir à un même système d’impôts des provinces qui avaient formé des états indépendans, ayant un régime

  1. Voyer la Revue du 15 janvier 1881.