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assassins, le 10 juin 1868[1]. Son successeur, Milan Obrenovitch, le prince régnant de Serbie, est un petit-fils d’Ephrem Obrenovitch, frère de Milosch. Né en 1854, adopté plus tard par le prince Michel, il fut envoyé en 1864 à Paris, pour y faire son éducation. Les événemens de 1868 le rappelèrent brusquement à Belgrade, où il fut proclamé prince le 23 juin. Pendant quatre ans, le pouvoir exécutif resta entre les mains d’un conseil de régence, et c’est seulement depuis le 22 août 1872, jour de sa majorité, que Michel II gouverna de nom et de fait. Après s’être associée en 1876, d’une façon d’abord assez malheureuse, à l’insurrection de Bosnie, la Serbie a finalement obtenu, grâce aux traités de San-Stefano et de Berlin, son indépendance à peu près complète, et un agrandissement considérable. Elle est entrée aujourd’hui dans une ère de progrès, et son armée a été réorganisée d’une façon remarquable[2].


III

La Serbie n’a pas vu beaucoup se modifier les frontières naturelles de son ancien territoire en s’annexant en 1878 quelques districts, d’accord en cela avec les grandes puissances européennes. Elle a pour limites, au nord, la Save et le Danube ; au midi, la grande chaîne Mœsique ; à l’ouest, la Drina ; à l’est, la Morava bulgare et sa vallée magnifique.

L’aspect général du pays est celui d’un immense triangle dont la Save et le Danube forment, au nord, la base. Le sommet sud du triangle se trouve à Vranja, à 200 kilomètres environ seulement de Belgrade, la capitale. La Serbie, qui n’est bien connue topographiquement que depuis la publication de la carte de H. Kiepert, — laquelle toutefois n’est pas exempte d’erreurs, — se partage en deux régions ; l’une comprend les bassins de la Morava serbe et de la Morava bulgare ; l’autre est formée par ces deux rivières réunies et porte le nom de Grande-Morava. Dans la première région, on ne trouve que des montagnes aux saillies escarpées et dont les parties basses sont baignées par des rivières ou des ruisseaux profonds. D’immenses forêts de hêtres et de chênes couvrent ces montagnes. La plus haute est le massif du Kopaonik, élevant sa tête couverte en hiver de neiges à 2,000 mètres au-dessus du niveau de la mer. Dans la

  1. Voyez, sur ces événements, le récit de M. George Perrot dans la Revue du 1er juillet 1869.
  2. En 1867, l’armée régulière de la Serbie ne se composait que de six mille cinq cents hommes, dont deux cents hommes seulement de cavalerie. Selon une loi votée en 1880 par l’assemblée nationale, elle sera désormais de cent cinquante mille soldats et de deux cent mille en temps de guerre. La population mâle est de six cent quatre-vingt quinze mille individus.