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jours, je soutiens que les autres consommations en seront accrues, que le travail augmentera, que de nouvelles matières imposables se produiront, et que de cet ensemble de faits découleront des conséquences certainement favorables pour l’état, parce que l’amélioration de la situation économique tourne toujours à l’avantage des finances nationales. J’en conclus que l’abolition du droit sur la mouture n’est pas seulement un acte de justice, mais aussi un acte de sage économie. »

Malgré les applaudissemens qui accueillirent ces paroles, M. Magliani n’eut point gain de cause. La chambre des députés pouvait se croire liée par ses votes antérieurs ; le 28 mars précédent, elle avait par un vote formel approuvé le programme financier du ministère et confirmé l’ordre du jour du 7 juillet 1878, qui avait condamné le droit sur la mouture. Néanmoins le nombre et l’importance des nouveaux impôts qu’il fallait établir n’étaient pas sans inquiéter les députés pour leur popularité personnelle; et le ministre, avec autant de franchise que de fermeté, ne leur laissait aucune illusion et ne leur offrait aucune issue. « C’est un devoir, disait-il, de revenir à la règle ancienne, un peu oubliée depuis quelque temps, que toutes les fois qu’une augmentation de dépenses est présentée à l’approbation de la chambre et que le budget n’offre pas le moyen d’y faire face, il convient de la compenser par une économie équivalente ou par une recette nouvelle, afin que cette dépense ne puisse jamais porter atteinte à l’équilibre du budget, qui est obligatoire. » Rien ne pouvait être plus sage et plus conforme au devoir d’un véritable ministre des finances que le principe si nettement posé par M. Magliani; et cependant le seul énoncé de cette règle rigoureuse, bien que salutaire, produisit une vive émotion au sein de la chambre. Quant au sénat, dont la liberté d’appréciation était entière, les adversaires du projet de loi y étaient plus nombreux qu’au sein de la chambre.

On y objecta au ministre des finances que l’année 1878 n’avait pas été bonne, que beaucoup d’industries avaient souffert et s’en ressentaient encore; que la récolte de 1879 s’annonçait mal et qu’il était à craindre que le progrès des recettes du trésor ne s’arrêtât et même ne fît place à un recul. On contesta l’exactitude de ses calculs, bien qu’il les eût appuyés sur les considérations les plus probantes et qu’il en eût mis tous les élémens sous les yeux des chambres à l’aide de tableaux dressés avec autant d’intelligence que de clarté. On lui reprocha surtout de n’avoir pas tenu un compte suffisant des augmentations de crédits qu’il était indispensable de prévoir. Pour ménager les finances, on n’avait point renouvelé les approvisionnemens de munitions dans les arsenaux, on