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mais les alliés nous arrachaient 700 millions en 1815. En 1870 et en 1871, les réquisitions purement pécuniaires (outre les impôts directs et indirects perçus par les autorités allemandes) dépassaient 239 millions, et l’indemnité totale fut, on le sait, de 5 milliards.

Encore une fois, le vainqueur ne cherche plus même à faire croire qu’il entend être indemnisé de ses dépenses : il remplit sa caisse parce qu’il trouve une occasion de la remplir. C’est une façon nouvelle d’envisager la guerre, à laquelle on n’avait pas songé dans des siècles plus grossiers : on en viendra peut-être à lancer deux nations armées l’une sur l’autre pour réparer l’échec d’une combinaison financière ou pour rétablir l’équilibre d’un budget. Si la science du droit international peut arrêter l’Europe sur cette pente, elle aura moralisé la guerre et bien mérité du genre humain.

Il s’en faut donc que le droit international ait dit son dernier mot ; mais, si beaucoup de progrès sont à faire, il serait injuste de nier que des progrès sérieux ont été faits, et que les lois de la guerre continentale se sont améliorées depuis un demi-siècle. Le développement progressif du droit international maritime dans la même période est encore moins contestable, parce qu’aucun grand événement analogue à la guerre franco-allemande de 1870 n’est venu, dans cet ordre d’idées, remettre en question les conquêtes regardées comme définitives.


II.

« Considérant que le droit maritime en temps de guerre a été pendant longtemps l’objet de contestations regrettables ; que l’incertitude du droit et des devoirs, en pareille matière, donne lieu, entre les neutres et les belligérans, à des divergences d’opinion qui peuvent faire naître des difficultés sérieuses et même des conflits ; qu’il y a avantage par conséquent à établir une doctrine uniforme sur un point aussi important ; que les plénipotentiaires assemblés au congrès de Paris ne sauraient mieux répondre aux intentions dont leurs gouvernemens sont animés qu’en cherchant à introduire dans les rapports internationaux des principes fixes à cet égard… » Tel est le préambule de la déclaration signée le 16 avril 1856 par les plénipotentiaires de la France, de l’Autriche, de la Grande-Bretagne, de la Prusse, de la Russie, de la Sardaigne, de la Turquie, et à laquelle adhérèrent, on le sait, toutes les puissances maritimes, sauf l’Espagne, les États-Unis et le Mexique. Voilà le plus grand événement qu’on ait jamais signalé dans l’histoire du droit international maritime et tout ensemble la meilleure réponse qu’on ait faite à l’opiniâtre scepticisme de quelques hommes politiques et de quelques chefs militaires. Les publicistes avaient propagé dans le monde un