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pour une nombreuse colonie et de faire les préparatifs pour l’arrivée et l’installation des émigrans. Le colonel William Wakefield eut la mission de tout organiser. Un beau navire est acheté : le Tory, on embarque des armes et mille objets propres à tenter les Maoris; on emmène un interprète, un Néo-Zélandais, qui vient de passer deux années à Londres; un dessinateur, un naturaliste d’origine allemande, le docteur Ernest Dieffenbach, que ses études sur la Nouvelle-Zélande rendront célèbre. Les colons seraient attendus au port Hardy, dans l’île d’Urville, à partir du 10 janvier 1840, Le 9 mai 1839, à Gravesend, le Tory met à la voile, salué par les acclamations d’une foule rassemblée sur les rives de la Tamise, comme si le vaisseau britannique allait conquérir un royaume. On répétait que la France désormais ne pourrait plus songer à établir à la Nouvelle-Zélande une colonie pénitentiaire, ainsi qu’il en avait été question. Avant la fin de l’année 1839, neuf bâtimens de la compagnie emportaient vers le havre Nicholson 1,117 émigrans, des machines, des instrumens agricoles, des vêtemens, des marchandises de toute sorte, et même quantité de livres dans le dessein de fonder une bibliothèque publique; en outre, le matériel nécessaire pour la publication d’une gazette de la Nouvelle-Zélande[1]. Le Tory arrive au détroit de Cook dès le mois d’août, et aussitôt, le colonel Wakefield visite les baies et entreprend la reconnaissance du canal de la Reine-Charlotte. Déjà, en ces parages, des Européens isolés ont défriché des terrains qu’ils cultivent sans avoir obtenu aucune permission des Maoris. En cette région, les indigènes n’avaient pas encore appris comme ceux de la baie des lies à vendre aux hommes blancs des terres souvent inoccupées. Pourtant, les organisateurs de la colonie ne voulaient point s’emparer de grands territoires sans tenir une sanction bien positive des aborigènes, surtout si l’on englobait dans les acquisitions des villages ou des champs cultivés. On avait le projet alors de faire sur les terres qui seraient concédées une réserve d’un dixième pour les anciens maîtres du pays. Des pêcheurs de baleines étaient établis sur la côte, vivant avec des femmes maories qu’ils avaient rendues d’une propreté parfaite; on admirait leurs beaux cheveux noirs, entretenus avec un soin particulier. Un patron de barque, qui depuis longtemps séjournait dans la contrée, se rendit fort utile en donnant une infinité de renseignemens sur les endroits favorables à des établissemens européens. Le colonel Wakefield n’hésita plus à se rendre au port Nicholson, situé à l’extrémité méridionale de l’île du Nord.

Le lieu semble réaliser tous les avantages pour l’emplacement de

  1. Informations relative to New-Zealand, by John Ward, secretary to the New-Zealand Company; London, 1840.