Page:Revue des Deux Mondes - 1882 - tome 49.djvu/399

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de satisfaction, croyant avoir mis fin aux conflits; mais déjà trois régimens avaient reçu du commandant des forces militaires l’ordre de se porter sur la Waïkato et d’y faire des routes. On l’imagine, un changement complet se produit dans l’esprit des Maoris ; ils n’ont plus d’autre rêve que de s’isoler des Européens. Au mois de septembre 1862, le gouverneur a des entrevues avec les différens chefs ; il ne trouve plus que des dispositions hostiles. On assure qu’il courut des risques pour sa vie.

La situation s’assombrit; de la part des Européens aussi bien que du côté des indigènes, les actes de violence se multipliaient; de temps à autre, des escarmouches s’engageaient. Le 13 juillet 1863, le général Cameron franchit les limites des tribus et oppose à cinq mille Maoris une armée forte de quinze mille hommes, pourvue d’un matériel considérable. En plusieurs rencontres, les Maoris soutiennent le choc avec une vaillance superbe. Ils avaient concentré leurs principaux moyens de défense à Rangiriri, où des fortifications étaient construites avec un soin et un art qui excitèrent l’admiration des ingénieurs anglais. Les guerriers maoris, protégés en avant par le fleuve, en arrière par le lac Waïkari et un marais profond, ne soupçonnaient pas qu’ils pussent être atteints par les feux des navires. Attaquées de front, prises en flanc par les canonnières, les premières lignes cèdent et gagnent la campagne; mais au centre, les défenseurs bravent tous les efforts ; quatre fois les assaillans sont repoussés. La journée s’avance, la nuit est proche; le général Cameron se décide à réclamer du commandant des forces de mer, sir W. Wiseman, tous les matelots dont il dispose. Bientôt mise à terre, la brigade navale se précipite sous le feu de assiégés ; elle est contrainte de battre en retraite; ralliée, elle se lance de nouveau et plie encore. Pour entraîner ses troupes, le général s’expose d’une façon si téméraire que les Maoris eux-mêmes applaudissent à tant de bravoure. Le soir venu, les troupes britanniques comptent les morts et les blessés; ils étaient nombreux. Pendant la nuit, on monta une puissante batterie; au point du jour, les défenseurs de la place, écrasés par les projectiles, hissent le pavillon parlementaire. Cent quatre-vingt-trois Maoris se rendirent prisonniers de guerre. Un moment, les Anglais vainqueurs croyaient avoir jeté l’épouvante parmi les tribus au point de les décourager; il n’en était rien, la guerre se rallume. Après maint combat, les troupes britanniques ont atteint Orakao ; c’est le dernier refuge des tribus de la Waïka. Trois à quatre cents guerriers privés d’eau, manquant de vivres, ayant des femmes et des enfans blottis près d’eux, défient dans leur repaire l’armée de Cameron traînant son artillerie. Lorsque tout est prêt pour une attaque qui semble devoir être décisive, le général crie aux braves Maoris d’abandonner la lutte, qu’ils seront épargnés,