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quitte à ajouter uns feuille de timbre. La science vole vers d’autres sommets.

Il faut au plus vite organiser, près des justices de paix et des tribunaux, un corps d’interprètes surtout chargés de l’interprétation orale. Ce seront généralement des indigènes ou des Français élevés comme eux, mais, en tout cas, connaissant à fond la langue parlée du pays où ils exercent et capables de saisir sans effort les phrases les plus rapidement prononcées, les doubles sens les plus habilement convenus, sans quoi il est presque impossible de recueillir fidèlement les témoignages, surtout en cas de confrontation. Quant à la connaissance du français, il ne faudra se montrer difficile à cet égard que si le nombre des candidats le permet. C’est même une connaissance superflue ; un peu plus, un peu moins de correction, cela importe peu, puisque c’est le juge qui dicte au greffier. Les gens connaissant bien les deux langues peuvent être, en général, utilisés dans des emplois plus importans et qu’il faut mieux rétribuer pour en faciliter le recrutement. Tous les services sont solidaires dans une société ; écrémer, au profit d’un seul, la masse des candidats, ce n’est pas d’une bonne administration. Dépasser le but, c’est le manquer.

L’emploi d’interprète judiciaire est très important, mais dans un ordre spécial, comme celui de l’huissier et du greffier, deux fonctionnaires qui peuvent, à la rigueur, écorcher quelquefois leur français et même leur orthographe, et qui, néanmoins, seront de bons officiers ministériels, s’ils ont de l’ordre et de la pratique. Ce sont des fonctions éminemment secondaires, desquelles les esprits supérieurs doivent être éloignés.

Je me garderai toutefois d’être exclusif à l’endroit des attributions de l’interprète judiciaire. Cet agent doit être capable d’écrire quelques lignes d’arabe et de français, comme les chaouch des contributions et du domaine, de manière à pouvoir traduire succinctement, guide-âne en main, les exploits d’huissier et les lettres de convocation, comme aussi à donner une idée au juge de paix de ce que contiennent les rapports des chefs indigènes.

Rien n’empêche non plus de tenir compte de leurs connaissances littéraires dans l’établissement de leur tableau d’avancement, et d’attribuer à celles-ci un coefficient d’importance égal par exemple à la moitié de celui qui sera choisi pour l’interprétation orale. Nous indiquerions ainsi pour cette dernière aptitude le plus haut coefficient, vingt ; dix-huit pour la moralité, dix-sept pour la discipline, seize pour la santé ; puis, pour l’énergie et l’activité, quinze ; quatorze pour la tenue ; douze pour la prestance naturelle ; dix pour l’interprétation écrite, et il resterait encore de la place pour le classement des aptitudes secondaires. En multipliant chacune des notes d’un même sujet par le coefficient