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pas cette défense complètement rassurante, et il se prépare à l’augmenter par la construction de trois autres forts.

«… Il a pris d’autres précautions.

« Le pourtour du fiord laisse entre la mer et le pied des collines un espace de terrain où les constructeurs auraient pu placer des cales couvertes, des chantiers, des docks et tous les ateliers que comporte un grand établissement maritime ; mais, pour plus de sûreté, l’arsenal et le port ont été concentrés dans un bassin creusé à l’intérieur du fiord, sur la rive orientale, près d’un village de pêcheurs qu’on nomme Ellerbeck. Six ouvrages de défense sont spécialement réservés pour couvrir ce bassin et les établissemens qui l’entourent. Enfin la forteresse de Rendsbourg, enlevée aux Danois et située dans le voisinage, pourrait au besoin porter secours à la flotte ancrée dans le port et prendre entre deux feux les troupes de débarquement.

« Au demeurant, le port de Kiel, tel qu’il existe, avec une rade magnifique, un bassin où la mer à 40 pieds de profondeur, où les bâtimens peuvent partout accoster au rivage, où l’on ne rencontre ni courans ni bas-fonds, où la nature a préparé pour ainsi dire l’emplacement de formidables fortifications, n’a rien à envier aux plus beaux établissemens maritimes. La défense en a été réglée par une commission que présidait M. de Moltke en personne ; il est dès à présent imprenable.

« Le gouvernement de Berlin a cru devoir en outre se ménager un poste fortifié dans la mer du Nord, en face de l’Angleterre…

« … Il y avait, sur la mer du Nord, un lieu favorable à la création d’un tel port ; c’était le duché d’Oldenbourg, dont le territoire commence au Weser et finit à la Hollande… La Prusse étant pressée de construire le port, elle acheta, en 1853, au grand-duc, au prix de 1,875,000 francs, un terrain de 310 hectares à l’embouchure de la Jahde, rivière qui se jette dans la mer du Nord, à l’ouest du Weser. La Jahde se décharge au fond d’une baie dont la profondeur et l’étendue sont loin de pouvoir être comparées au fiord de Kiel, mais où des travaux d’ailleurs considérables pouvaient permettre de fonder un port militaire. Le gouvernement berlinois avait choisi cet emplacement. Singulière coïncidence, ce choix fut fait d’après l’avis de Napoléon Ier, qui avait désigné comme propre à la construction d’un grand port de guerre la baie de Jahde, à l’époque où le département des Bouches-du-Weser était compris dans les limites de l’empire français.

« Les travaux furent entrepris sans retard ; l’œuvre était d’un accomplissement difficile. Les terres, en cet endroit, sont plates, stériles et composées d’une argile sablonneuse ; elles se délaient et