qu’il en a été jugé ainsi dans tous les États-Unis. Dans ces circonstances, il était assez naturel que la délégation officielle française, militaire et maritime, se refusât, ainsi que cela avait été primitivement convenu, à retourner à bord de la City of Catskill, pour chercher nos compagnons de voyage prussiens et qu’elle insistât pour se rendre à terre, suivant l’offre de l’amiral Halligon, dans les embarcations du bord sous les couleurs françaises. Voilà, réduite à ses véritables proportions, toute l’histoire du conflit qui s’est élevé à Yorktown entre le drapeau allemand et le drapeau français. Je ne serais cependant pas un historien fidèle si je n’ajoutais deux choses : la première, c’est que le lendemain tout pavillon quelconque américain, français, allemand, avait par ordre disparu de la flotte, — c’était la seule solution possible, — tandis qu’à terre le pavillon français a continué au contraire de flotter seul pendant trois jours ; la seconde, c’est que celui de tous les ministres américains qui par sa haute situation avait eu peut-être le plus de part dans l’incident, a mis pendant les jours suivans tous ses soins à nous faire oublier ce que cet incident avait pu avoir de pénible, et qu’à force de prévenances, d’esprit, et de bonne grâce, il y a réussi complètement.
Ce petit épisode que je viens de rapportera eu une conséquence assez piquante. Le premier jour des cérémonies d’Yorktown devait être consacré à la pose de la première pierre d’un monument commémoratif. Après nous avoir attendus pendant assez longtemps pour ouvrir la cérémonie, on avait jugé à propos de la commencer sans nous. Pendant que les pourparlers s’échangeaient, la cérémonie allait son train ; les pourparlers duraient encore qu’elle était déjà finie. On est venu nous annoncer cette nouvelle qui coupait court à toute hésitation, de sorte qu’après être venus de France pour assister à la pose de la première pierre d’un monument, nous avons laissé la cérémonie se passer sans y paraître, et qu’après avoir disputé pendant deux heures sur le meilleur mode de débarquement, nous avons fini par ne pas débarquer du tout. La nouvelle nous est apportée par quelques membres de la Centennial Association d’Yorktown, qui ont été les véritables initiateurs de l’invitation à nous adressée. Leur accueil chaleureux où nous retrouvons dans toute sa cordialité la pensée-mère de toutes ces fêtes, achève de dissiper les quelques nuages que les petites difficultés de ce jour avaient amassés et, après être retournés à bord de la City of Catskill, qui est venue s’accoster à l’un des piers, nous nous préparons à débarquer chacun pour notre compte, n’étant pas fâchés de toucher terre après deux jours de navigation. Une chose me fait regretter cependant d’avoir manqué la cérémonie officielle. La première pierre du monument commémoratif devait être posée non