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choses, que l’application des lois sur les égouts fût confiée à une commission unique pour toute la métropole, au lieu de rester entre les mains d’autorités indépendantes. On n’était plus au temps où un millier de personnes, la plupart nommées ex officio, possédant une juridiction mal définie, s’occupaient de cette branche si importante de l’administration locale ; elles s’en acquittaient fort mal, et pour remédier à leur incapacité, leur nombre avait été considérablement réduit, sans améliorer beaucoup la situation.

En 1848, au mois de septembre, fut voté le Metropolitan Sewers Act, autorisant la reine à instituer une seule commission pour remplacer celles qui existaient auparavant. On lui attribuait le territoire, dans un rayon de 12 milles autour de la cathédrale de Saint-Paul. La durée de la loi était limitée à deux ans. Un acte ultérieur étendit les pouvoirs de la commission des égouts et donna force obligatoire aux règlemens qu’elle élaborait. Elle fut autorisée à emprunter 600,000 livres sterling. Les mesures prises par elle ne furent pas toutes couronnées de succès ; elles amenèrent cependant une amélioration notable. Un des travaux les plus utiles qui marquèrent son activité fut la levée de plans sans lesquels l’établissement d’un système efficace d’égouts eût été impossible et dont profitèrent ses successeurs. Le mode qui avait présidé à l’institution de cette commission avait un défaut : il ne tenait aucun compte du rapport constitutionnel entre la taxation et la représentation ; les contribuables n’avaient pas voix pour élire ceux qui administraient leurs affaires.

Le système de canalisation souterraine présentait ainsi une uniformité relative, puisqu’il était entièrement sous le contrôle de commissaires nommés par la couronne. Il n’en était pas moins dans une condition fort imparfaite. Nombre d’égouts collecteurs, dans les districts suburbains, n’étaient que d’anciens ruisseaux et cours d’eau qui avaient été transformés peu à peu en réceptacles et qui coulaient à ciel ouvert, empestant l’air et infectant la ville. De plus, la Tamise, pendant son parcours à travers la capitale, recevait la décharge de tous les égouts. Le fleuve avait perdu ce caractère de pureté et de limpidité qui faisait l’admiration d’un ambassadeur espagnol deux ou trois siècles auparavant. Il charriait dans ses ondes les immondices de toute la ville, et le résidu des fabriques bâties sur ses rives. La rapidité du courant avait longtemps paru suffire pour entraîner jusqu’à la mer les impuretés déversées dans le fleuve. Il n’en était plus ainsi : chaque année l’empoisonnement de la Tamise allait en croissant. Durant l’été brûlant de 1854, les membres du parlement (on sait que le palais gothique où ils siègent côtoie la Tamise) commencèrent à se sentir sérieusement alarmés ; — leur