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contraires, en admettant que l’air pénètre dans les cyclones à la fois par la base et par le sommet et qu’il est expulsé latéralement ; d’autres soutiennent qu’il afflue en bas et déborde en haut, ce qui s’accorde avec l’existence des aires de haute pression à côté des dépressions qui marquent les centres des bourrasques. Cette opinion trouve un appui dans les résultats auxquels M. Clément Ley, M. Hildebrand Hildebrahdsson, M. Loomis, ont été conduits par l’étude de longues séries d’observations des cirrhus recueillies en Angleterre, en Suède, en Danemark et en d’autres parties de l’Europe ainsi qu’aux États-Unis. D’après ces deux météorologistes, les mouvemens des nuages prouveraient que, dans les hautes régions de l’atmosphère, l’air s’éloigne des minima de pression et afflue vers les maxima, tandis que l’inverse a lieu près de la surface terrestre.

Dans l’état actuel de la science, la théorie mathématique de ces phénomènes est à peine abordable, et peu de géomètres s’y sont risqués. Il y a quelques pages consacrées aux tourbillons dans les savans mémoires de M. Boussinesq ; on trouve aussi dans les traités de mécanique la démonstration d’une loi déjà indiquée par Léonard de Vinci, d’après laquelle la vitesse angulaire des molécules croît en raison inverse du carré du rayon. Mais cette loi est en défaut près du centre, où nous savons que la vitesse s’annule. M. A. Colding est parvenu à établir des formules qui répondent mieux à la réalité des choses, car elles font prévoir l’existence d’un calme central[1]. En les appliquant aux ouragans du 2 août 1837 et du 21 août 1871, observés l’un et l’autre à Saint-Thomas, M. Colding fait voir qu’elles représentent très bien la marche du baromètre telle que la donnent les observations. Il conclut de sa théorie que des courans qui rasent le sol pénètrent dans les cyclones toutes les fois qu’un obstacle ralentit la vitesse de rotation ; ces courans s’y élèvent et, parvenus au sommet, sont refoulés vers la circonférence. Enfin M. Colding démontre que les bords des fleuves aériens qui circulent côte à côte entre les pôles et l’équateur présentent les conditions voulues pour la production des mouvemens tournans, mais avec cette différence que, sur la rive gauche, il peut facilement naître des tourbillons violons qui, tous, tournent contre le soleil, tandis que les mouvemens tournans qui se produisent à droite et qui nécessairement tournent avec le soleil, ne peuvent jamais devenir des ouragans ni même des bourrasques. Il s’agit ici de l’hémisphère nord ; sur l’hémisphère sud, c’est la rive droite qui fournit les tourbillons.

La théorie mécanique de la chaleur, à laquelle on n’a pas manqué de faire appel en dernier ressort, a répondu, comme l’oracle, à

  1. Nogle Bemœrkninger om Luflens Strœmingsforhold. Copenhague, 1871. — Om Hvirvelstormen paa Saint-Thomas. Copenhague, 1872.