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princes-électeurs et d’autres grands vassaux, en vertu d’un droit que ceux-ci s’étaient arrogé, ne pouvaient prétendre à la même importance que les nobles qui tenaient leur noblesse de l’empereur, qu’elle fût personnelle ou héréditaire. Entre les comtes ou grafs, on distinguait les landgraves, les margraves, les burgraves, qui constituaient la haute noblesse ; mais leur préséance se réglait moins par leur titre que par l’étendue et la puissance de leur domaine. Au-dessus d’eux se plaçaient généralement les herzogs ou ducs, peu nombreux en Allemagne, et, par dessus eux, les archiducs. Les freiherren ou barons n’étaient, à proprement parler, que les possesseurs de terres affranchies de tout service roturier, mais cette qualification fut de bonne heure donné par les princes comme un titre inférieur de noblesse. Dans les villes libres de l’empire, les gros bourgeois qui avaient exercé des charges municipales formèrent la souche d’une sorte de noblesse inférieure jouissant de privilèges et qu’on appelait les patriciens. Quant à la qualification de chevalier (ritter), elle resta ce qu’elle était à la fin du moyen âge, une simple marque de noblesse. Dans le royaume de Bohême, on partageait la noblesse en deux classes, celle des barons et celle des chevaliers. Les comtes, qui étaient peu nombreux, faisaient corps avec la première, et les marquis n’existaient point. En Espagne, au XVIe et au XVIIe siècle, la haute noblesse comprenait les ducs et les princes, les marquis et les comtes. Au-dessous d’eux se plaçaient les barons et au plus bas de l’échelle était la petite noblesse vivant sans éclat de son revenu. Dès le principe, l’usage des parages n’avait point été admis en France pour les grandes baronnies. Il en résulta que les fiefs de dignité ne se partagèrent pas, et jusqu’à la fin de l’ancienne monarchie ils relevèrent tous directement du roi et furent indivisibles. Ils se transmettaient par droit de primogéniture. L’aîné des fils héritait donc du titre attaché au fief. Il était duc, marquis, comte, etc., comme l’avait été son père, si toutefois le roi n’avait point érigé pour lui la seigneurie paternelle en un fief d’un rang plus élevé. Mais comme un gentilhomme pouvait posséder plus d’un fief de dignité, réunir dans sa main, par suite d’héritage ou autrement, diverses terres titrées, les puînés, si l’aîné y consentait, en recevaient quelquefois leur part. En droit, tous les fiefs de dignité, comme les autres seigneuries, compris dans la succession, étaient dévolus à l’aîné, qui prenait les divers titres que son père avait portés. Accordait-on, au contraire, au puîné la jouissance d’un des fiefs de dignité laissés par le père, ce fils cadet en prenait alors ordinairement le titre, tandis que l’aîné gardait le fief de dignité principal et en portait le nom. De la sorte, deux frères, et même davantage, pouvaient hériter à la mort de leur père de la même qualification, si l’héritage de celui-ci comprenait plusieurs fiefs de