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devait être affecté à la dotation du titre et passer à celui qui en héritait.

Les nouveaux comtes étaient en outre autorisés à instituer en faveur de leur fils aîné ou puîné un majorat auquel devait être attaché le titre de baron. Ce titre était de plus conféré personnellement aux présidens des collèges électoraux des départemens, aux premiers présidens et procureurs-généraux de la cour de cassation, de la cour des comptes et des cours d’appel, aux évêques, et, après dix ans d’exercice, aux maires des trente-sept bonnes villes ayant droit d’assister au couronnement. Les présidens des collèges électoraux, devaient avoir exercé leurs fonctions pendant trois sessions ; mais, pour obtenir le titre de baron, ces divers fonctionnaires devaient justifier d’un revenu annuel de 15,000 francs, dont le tiers était pareillement affecté à la dotation du majorat. Les membres de la Légion d’honneur reçurent le titre de chevalier, qui devenait transmissible à leur descendance par ordre de primogéniture en justifiant d’un revenu annuel de 3,000 francs et quand ils avaient sollicité des lettres patentes.

Napoléon Ier, on le voit, empruntait les qualifications de sa nouvelle noblesse au vocabulaire féodal, mais il avait repoussé le titre de marquis, tombé quelque peu vers la fin de l’ancien régime dans la déconsidération. Il ne fit pas non plus revivre le titre de vicomte et il plaça le titre de prince au-dessus de celui de duc. Cette noblesse était en principe purement personnelle, puisque l’hérédité n’y était attachée que sous la condition d’institution d’un majorat. C’était une récompense de la même nature que la Légion d’honneur, destinée à unir plus étroitement au trône impérial ceux auxquels elle était conférée. Aussi le décret du 1er  mars 1808 qui l’instituait portait-il à son article 37 : « Ceux de nos sujets auxquels les titres de duc, de comte ou baron, ou chevalier seront conférés de plein droit, ou ceux qui auront obtenu en leur faveur la création d’un majorat prêteront dans le mois le serment suivant : « Je jure d’être fidèle à l’empereur et à sa dynastie, d’obéir aux constitutions, lois et règlemens de l’empire, de servir Sa Majesté en bon, loyal et fidèle sujet et d’élever mes enfans dans les mêmes sentimens de fidélité et d’obéissance et de marcher à la défense de la patrie toutes les fois que le territoire sera menacé ou que Sa Majesté irait à l’armée. »

La nouvelle noblesse était donc destinée à former autour du trône un corps de gentilshommes moralement obligés par leur serment à ce même service militaire que devait la vieille noblesse, quand on appelait le ban et l’arrière-ban. Napoléon Ier n’entendait cependant pas pour cela ressusciter la féodalité ; il ne voulait pas que ses nobles pussent s’intituler seigneurs d’une localité. La loi du 20 juillet 1808 interdit même de prendre le nom d’une commune comme nom patronymique. La constitution du majorat était destinée à assurer à