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originaire de l’Asie, et que la région où elle se trouve était très fréquentée par les Syriens et les Asiatiques païens et chrétiens. Les voyages des chrétiens de l’Orient vers Rome, soit pour leurs affaires privées, soit pour celles de leurs églises et de leur religion, étaient extrêmement fréquens. On pense bien qu’ils devaient donner lieu à des rapprochemens, à des combinaisons, à des mélanges singuliers, mais fort instructifs, d’où M. de Rossi ne manquera pas, en illustrant ce nouvel épisode, de tirer de vives et intéressantes lumières.

C’est des mérites de M. de Rossi vrai fondateur de la science archéologique chrétienne que le P. Bruzzi, en ouvrant la séance, a parlé spécialement. Ces mérites ont été exposés trop souvent et trop bien ici même par M. Gaston Boissier, avec sa rare compétence dans le domaine des lettres latines, païennes ou chrétiennes, pour qu’il y ait à revenir sur tant de beaux résultats, et la place nous manquerait à vouloir parler des derniers travaux concernant saint Hippolyte. Nous ne voulons que faire remarquer expressément, — l’occasion nous en est bonne, — combien il serait erroné de croire que l’archéologie chrétienne, entre les mains d’un maître comme M. de Rossi, puisse n’être qu’une science étroite, toute spéciale, et de nature à n’intéresser que les érudits. Bien au contraire, son Corpus des inscriptions chrétiennes ajoute beaucoup à la connaissance des institutions romaines; sa Rome souterraine offre des aspects nouveaux du droit romain; son Bulletin même, qui paraîtrait ne devoir présenter que des observations de détail à mesure qu’il enregistre le progrès de ses travaux, contient des pages d’histoire générale renouvelée qui sont d’un grand prix. Tel est, si l’on veut un exemple, le récit de la réaction païenne de l’an 394, auquel s’ajoutent les informations inattendues et précises qu’il a su tirer soit d’une longue et importante inscription trouvée naguère au forum de Trajan, soit d’un poème découvert par M. Léopold Delisle aux derniers feuillets de notre célèbre manuscrit de Prudence, manuscrit et poème contemporains de ces grands événemens. On pourrait citer comme second exemple l’intéressant commentaire à l’année 410 que M. de Rossi a placé dans le premier volume de son grand recueil épigraphique. C’est, comme on sait, la date de l’invasion d’Attila. Or tout à coup la série chronologique des inscriptions chrétiennes, qui allait grandissant en nombre d’année en année, s’interrompt : plus un texte à enregistrer, et il faut laisser trente années s’ébouler pour que la moisson recommence. Ne sont-ce pas là des traits caractéristiques pour l’histoire générale, et ne peut-on pas calculer par ce seul exemple ce que durent être dans l’Italie centrale la terreur et la dévastation pendant une si longue période? Est-ce d’ailleurs une petite et étroite érudition, celle qui répand de premières et abondantes lumières sur des problèmes comme ceux-ci : propagation et constitution de l’église