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cathédrale d’Andria, à côté de la tombe où reposait déjà la seconde, Yolande de Brienne.

Les deux vers léonins par lesquels l’inscription se termine,


Hoc fieri iussit Fredericus Cesar ut urbs sit
Foggia regalis sedes inclita imperialis,


ont tout à fait la tournure des épigrammes latines, tantôt élogieuses et tantôt satiriques, que Frédéric se plaisait à composer sur les villes de ses états et que certaines d’entre elles, comme Andria, ont fait graver au-dessus de leurs portes ainsi que des titres d’honneur. On ne se tromperait donc pas, je crois, en la comprenant dans le recueil des œuvres poétiques de cet empereur. Mais il y a mieux. Frédéric, intelligence supérieure au travers de ses vices, nature d’artiste en même temps que de politique, esprit singulièrement cultivé pour son temps, épris de tous les raffinemens et de toutes les élégances, se piquait d’exercer les arts comme la poésie. Il avait la prétention d’être un maître en architecture. Nous savons par des témoignages formels que c’est lui-même qui donna les plans et les dessins pour la construction du château de Capoue. Il me paraît ressortir formellement de la première partie de l’inscription de la porte de son palais de Foggia qu’il avait fait de même pour cet édifice. Les termes remarquablement précis dont on s’y sert impliquent une telle conclusion : sic Cesar fieri iussit opus istu, proto (ncius) Bartholomeus sic costruxit illud. C’est tel qu’on le voit, tel que l’a construit Bartolomeo, que l’empereur avait ordonné de le faire ; la répétition de l’adverbe sic est absolument significative et révèle l’emploi d’un modèle donné par Frédéric en personne. L’arc qui seul a été conservé de ce palais est donc un spécimen, et l’unique parvenu jusqu’à nous, qui fait connaître le style et la manière de l’empereur Frédéric II comme architecte. Ce morceau le classe à un rang distingué dans la liste assez peu nombreuse des souverains artistes par eux-mêmes.

Il ne reste plus rien du château fortifié que Charles Ier d’Anjou se fit construire à Foggia en 1269 et où il mourut en 1284, non plus que du parc de plaisance du Pantano, à la porte de cette ville, où il élevait des troupeaux de daims.


III.

Pour aller de Foggia à Manfredonia, on est condamné à une insupportable route de quatre heures de voiture à travers la steppe du Tavoliere, qui devient un véritable Sahara dans la saison où l’herbe