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les attributions de l’état de définir ce que les hommes doivent ou peuvent adorer. — Le membre : — J’ai compris que vous disiez l’autre jour ne reconnaître ni Dieu, ni Christ, ni Bible. — Le Rév. Hinckley : — Ce que j’ai dit, c’est que nous ne pouvions les reconnaître comme le font les confessions de foi. Nous reconnaissons un pouvoir s’exerçant sur les hommes et au-dessus d’eux. — Le membre : — Ce que vous nommez un Pouvoir est ce que d’autres nomment Dieu. — Le Rév. Hinckley : Ici vous commencez à définir. Dès ce moment, vous trouvez des divergences inconciliables, aussi bien dans les églises qu’en dehors d’elles. » — Il faut mentionner que les pétitionnaires avaient obtenu l’appui de plusieurs ministres appartenant aux églises épiscopales, congrégationalistes et unitaires de la ville. On voit que l’esprit de tolérance religieuse n’a pas dégénéré dans l’ancienne colonie de Roger Williams.

Aux congrégations qui se sont directement fondées sur les principes de la « religion libre » il convient d’ajouter certaines communautés indépendantes de toute dénomination religieuse, comme la première congrégation de New-Bedford, qui prit parti pour son ministre, M. William J. Potter, lorsque celui-ci fut rayé des rôles de l’unitarisme. Cette église, fondée par les puritains au commencement du XVIIIe siècle, passe pour la première congrégation d’origine calviniste qui ait ouvertement arboré l’étendard unitaire ; car sa rupture avec l’orthodoxie date de 1810, c’est-à-dire de neuf années avant le discours de Channing qui donna le signal définitif du schisme. Il serait assez intéressant de suivre le mouvement d’idées qui a conduit ainsi, du calvinisme le plus strict au libéralisme le plus absolu, une congrégation placée dans les conditions ordinaires des églises américaines. Les différentes étapes de cette évolution pourraient s’y constater, rien qu’aux modifications successives du rituel : l’élargissement de la profession de foi imposée aux communians ; — la disparition de toute distinction entre les communians et les non-communians, entre les membres de l’église et les membres de l’association civile ; — la transformation du sacrement de la communion en cérémonie commémorative de la fondation du christianisme ; — le remplacement du symbolisme chrétien par un service en l’honneur de tous les grands réformateurs religieux et sociaux.

Bien qu’indépendante de la Free religions Association, « Société pour la culture éthique, » de New-York, mérite également de figurer au premier rang parmi les associations qui ont arboré le drapeau de la religion libre. Son ministre, ou plutôt son directeur, M. Félix Adler, a même présidé de 1880 à 1882 la Free religious Association, dont il représente surtout les tendances moralisatrices et humanitaires, c’est-à-dire la partie du programme précédemment