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les salles de l’Hôtel-Dieu, on a compté en moyenne 5 spores par litre d’air ; aux laboratoires de Montsouris, à peine 3 spores par litre. On voit que les semences cryptogamiques sont beaucoup plus rares dans les atmosphères confinées qu’à l’air libre. L’analyse microscopique des poussières répandues sur les meubles de nos appartemens conduit à des résultats analogues. Il n’en est pas moins vrai que, dans les chambres de malades, ces poussières pourraient conserver pendant longtemps des germes d’infection et mériteraient d’être étudiées, à ce point de vue, avec le plus grand soin.

Nous arrivons à la partie la plus intéressante des recherches de M. Miquel, qui a pour objet l’étude des germes de bactériens répandus dans l’air. Laissant de côté les nombreuses classifications, plus ou moins arbitraires, qui ont été proposées par divers botanistes, M. Miquel se contente de diviser ces organismes microscopiques en micrococcus, bactériums, bacilles et vibrions. Les micrococcus se présentent ordinairement sous la forme de cellules globuleuses, privées de mouvemens spontanés, dont les dimensions ne dépassent pas quelques millièmes de millimètre ; les microbes de ce groupe sont ceux qui dominent dans l’air de Paris. Les bacaériums affectent la forme de bâtonnets courts, mobiles, isolés ou réunis entre eux, au nombre de deux à quatre articles. Lorsqu’ils abondent dans une infusion, ils y produisent, en se croisant en tous sens, une sorte de fourmillement, il devient souvent difficile de les distinguer des bacilles, qui sont formés de cellules disposées en filamens rigides de longueur indéterminée. Les bacilles sont, les uns immobiles (comme la bactéridie charbonneuse de M. Davaine), les autres mobiles (comme le ferment butyrique de M. Pasteur) ; à côté des bacilles à filamens uniques, on rencontre encore des bacilles rameux. Enfin, M. Miquel réserve le nom de vibrions aux organismes filamenteux mous, ondulans, qui se meuvent dans les infusions à la manière des anguilles, tandis que M. Pasteur comprend sous cette dénomination une foule de bacilles.

Cette classification, fondée simplement sur des caractères extérieurs, a l’avantage de ne pas trancher prématurément des questions qui ne pourront être élucidées que lorsque nous connaîtrons mieux les phases variées de la germination et de la croissance de ces êtres infimes, les modifications qu’ils peuvent subir sous l’influence d’une nutrition riche ou pauvre, de la température, des agens chimiques, etc. Cette étude difficile est à peine ébauchée, et une obscurité profonde règne encore sur la filiation des espèces bactériennes, ainsi que sur les transformations dont elles sont susceptibles.

Les aéroscopes, d’un usage fort commode pour l’étude statistique des spores de cryptogames telles que les moisissures, les algues vertes, les lichens, deviennent insuffisans lorsqu’il s’agit de compter ces germes de bactériens, qu’un voile à peine translucide cache encore