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Page:Revue des Deux Mondes - 1883 - tome 57.djvu/477

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doit être content, il a ses auteurs, dont il distribué gratuitement les œuvres dans ses écoles. Cela vaut bien ces congrès d’instituteurs de province se réunissant pour divaguer à l’aise sous le regard paternel de l’inspecteur primaire, pour faire la leçon aux desservans et au gouvernement.

On dit que M. le président du conseil a de l’orgueil ; il n’en a vraiment pas autant qu’on l’assure, puisqu’il laisse courir ces inepties, puisqu’il supporte tout. Il aurait peut-être voulu maintenir les aumôniers des hôpitaux de Paris ; mais le conseil municipal ne l’entend pas ainsi et il s’incline. Le manuel de M. Paul Bert ne paraît pas lui plaire absolument ; mais M. Paul Bert est une puissance, il est par son influence sur les instituteurs émancipés le vrai ministre de l’instruction publique bien plus que M. Jules Ferry lui-même, — et il faut défendre M. Bert. M. le président du conseil défend encore le budget des cultes ; mais il supprime sans droit les traitemens ecclésiastiques, ce qui est toujours une manière de faire sa partie dans l’œuvre de secte qui s’accomplit aujourd’hui. Ainsi vont les choses et on ne s’aperçoit pas qu’on s’expose à rencontrer la résistance croissante de toutes les consciences sincères. On ne voit pas qu’on donne trop raison à M. Batbie disant avec autant de modération que de prévoyance : « Vous créez à la république, au régime républicain à peine établi, des difficultés que vous pourriez éviter et que vous devriez lui épargner. » C’est le dernier mot et la moralité de cette sérieuse discussion qui a eu au moins le mérite de montrer où nous en sommes dans cette voie de conflits religieux où le gouvernement s’est laissé entraîner sans savoir peut-être jusqu’où il ira, sans avoir maintenant la force de s’arrêter.

Qu’en est-il, d’un autre côté, de ce court et brillant débat qui s’est engagé aussi au Luxembourg sur nos affaires extérieures et qui touche certes à un des plus graves intérêts de la France, à l’intérêt national lui-même ? Ici, c’est un homme qui sait toujours allier l’élégante mesure du langage au sens supérieur des affaires diplomatiques, c’est M. le duc de Broglie qui s’est chargé d’interpeller le gouvernement sur le caractère, sur les conséquences de cette triple alliance de l’Allemagne, de l’Autriche-Hongrie, et de l’Italie dont on a déjà tant parlé, qui pourrait sans doute en certains cas créer une situation délicate à notre pays. M. le ministre des affaires étrangères, qui a lui-même parlé avec talent, avec habileté, a paru croire qu’il aurait mieux valu se taire sur une question qui ne pouvait recevoir de réponse, que le silence était ce qu’il y avait de plus digne, de plus fier dans certaines circonstances. C’est d’un fin diplomate. A quoi bon cependant affecter de se taire sur un incident qui a retenti partout, qui a été l’objet de toute sorte de commentaires dans la plupart des parlemens ? M. Gladstone a été interpellé dans le parlement anglais. M. Tirza a eu à s’expliquer dans la chambre de Buda-Pesth. M. Mancini s’est fait un devoir de