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comme Ingres et Flandrin, des architectes comme Percier, Blouet, Duban, Baltard, des sculpteurs comme David (d’Angers) et Pradier, des musiciens comme Herold et Halévy. Elle cite avec orgueil Colbert comme son fondateur ; elle pourrait faire remonter ses origines à Henri IV, qui paraît avoir eu le premier la pensée d’envoyer à Rome, « pour se perfectionner par l’étude des grands modèles et les leçons des bons maîtres, » de jeunes artistes français, recommandés aux soins paternels de son ambassadeur. L’Académie de France habite depuis 1801 cette magnifique villa du Pincio, où les Médicis avaient accumulé tant de chefs-d’œuvre — les Niobides, la Vénus, l’Apollino et l’Arruotino — qui décorent maintenant la tribune et la galerie de Florence. Elle a conservé de beaux débris, surtout des bas-reliefs antiques, dont il paraît bien que Raphaël avait fait à l’avance une étude attentive. Ingres y a retrouvé une Minerve archaïque qui figure aujourd’hui au Louvre. Tous ces souvenirs, joints à la magnificence des jardins et de ce qui les environne, en font un lieu élu et respecté. Forte de ses traditions et de sa gloire, associée déjà par ses travaux à ceux de l’École française d’Athènes, l’Académie de France peut exercer envers sa jeune sœur, l’École française de Rome, une protection dont elle recueillerait elle-même un notable profit. Ses pensionnaires architectes obtiennent de l’administration italienne, pour leurs études, des facilités précieuses, qui pourraient tourner à l’avantage de la science archéologique aussi bien que de l’art. On sait qu’au nombre de leurs obligations, il y a celle d’envoyer, au terme de leurs troisième et quatrième année, la restauration d’un édifice antique. Il leur faut d’abord relever avec un soin scrupuleux l’ensemble et les détails de l’état actuel. Pour bien comprendre le plan primitif, malgré les altérations ultérieures et les lacunes possibles, pour les suppléer habilement dans une réédification logique, ils doivent rechercher tous les documens de nature à les instruire, textes, médailles et bas-reliefs antiques, dessins du moyen âge ou de la renaissance, descriptions de voyageurs… Comment l’archéologue, comment l’érudit ne serait-il pas, en de telles circonstances, d’un grand secours à l’architecte ? Et réciproquement, quelle instruction précise celui-ci n’offrirait-il pas au lettré, en dehors des textes, par la seule intelligence des ruines mêmes ?

L’École française de Rome n’a pas négligé de rechercher cette alliance, très heureusement réalisée plusieurs fois, disions-nous, à Athènes, où les pensionnaires de la villa Médicis vont chercher des modèles plus purs, il est vrai, que ne les peut offrir généralement l’Italie. Les deux premiers volumes de nos Mélanges contiennent les premiers résultats de cette collaboration, qu’a