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où l’on n’aura pas à acheter la moindre parcelle de terre. A moins donc qu’on ne veuille considérer les 50 millions à dépenser et les trois cents nouveaux centres à établir comme une sorte de prébende électorale que les représentans de l’Algérie auraient le droit de se partager entre eux par portions égales, l’administration a pour de voir de commencer par tirer le meilleur parti possible des terres du domaine qui sont dès à présent à sa disposition dans le département de Constantine. Voilà une première et notable économie, mais elle n’est pas la seule qu’on puisse réaliser. La vente à l’enchère ou du moins à prix fixe, non-seulement des lots de fermes, mais, aussi des Iots de villages, en amènerait une beaucoup plus considérable. C’est la solution vers laquelle ont visiblement incliné les membres élus du conseil supérieur, ainsi que les chefs de tous les services administratifs et les esprits les plus éclairés de l’Algérie. La vente, en effet, a sur la concession gratuite cette supériorité qu’elle imprime une vive impulsion à l’initiative individuelle des petits capitalistes algériens ou immigrans arrivés de France qui désirent placer en immeubles le fruit de leurs économies. La vente présente, en outre, un caractère égalitaire qui plaira en Algérie. Elle n’y attirera que des colons sérieux pourvus des ressources indispensables à leur réussite ; elle fournira en même temps à l’état comme une sorte de fonds de roulement qui lui permettra de doter les nouveaux centres d’améliorations successives. A mon sens, les Français ou les naturalisés Français devraient seuls être admis aux adjudications. Il conviendrait peut-être de limiter à un maximum de 40 à 50 hectares les lots de villages et à 150 hectares environ les lots de fermes. Ce sont des chiffres généralement admis comme un bon terme moyen. Pour écarter les spéculateurs, il y aurait prudence, à stipuler dans les contrats de vente que, sauf le cas de décès de l’adjudicataire, la propriété ne pourrait être revendue avant un délai de cinq années. En revanche, il y aurait lieu d’accorder aux colons de grandes facilités de paiement, afin de ne pas leur enlever dès le début la plus grande partie de leurs ressources disponibles. On pourrait n’exiger que le paiement comptant d’un huitième M. prix, dont le solde serait acquitté en dix années sans intérêt. Supposant, par : exemple, l’acquisition de 40 hectares au prix de 100 francs, l’acquéreur aurait à payer comptant 500 francs et dix annuités de 350 francs chacune. Ce sont là des clauses d’acquisition fort douces.

Serait-il possible d’aller plus loin encore dans cette voie ? Il a été question de créer des banques spéciales de crédit pour les colons ou de modifier à leur profit les règlemens des institutions de crédit déjà existantes. Je n’aime pas les régimes d’exception, et je n’en