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sur la pierre des loculi et représentant des instrumens de métier sont moins des symboles que des indices ou des souvenirs de la profession des morts. D’autres objets incrustés dans le mortier des tombes n’étaient peut-être que des moyens de les reconnaître pour les parens ou les amis. Quand aux fioles dites vases de sang trouvées en grand nombre attachées aux tombeaux, qui ont tant exercé la critique, soulevé de si vives controverses, et où plusieurs ont vu des indices de martyre, il ne parait pas à M. Roller qu’elles aient une pareille signification. Les personnes qui s’intéressent aux antiquités chrétiennes connaissent la décisive argumentation de M. Le Blant sur ce point. M. Roller admet toute la partie polémique de ce solide mémoire ; mais non sans raison, ce nous semble, il conserve quelque doute sur les conclusions positives de M. Le Blant. Ce savant archéologue, en effet, après avoir réfuté l’opinion qui veut que la présence du vase de sang indique une tombe de martyr, admet que les fioles en question ont contenu en effet du sang de martyr, mais qu’elles ont été attachées à certaines tombes comme pour garder et protéger les morts qui y étaient enfermés. Or, comme plusieurs de ces tombes sont de la fin du IVe siècle, c’est-à-dire près d’un siècle après la dernière persécution, on peut se demander avec M. Roller où l’on se procurait ce sang, comment on le conservait de la sorte à la disposition de fidèles inconnus, et sur quels témoignages des auteurs du temps on peut s’appuyer pour justifier l’usage supposé par M. Le Blant. M. Roller va plus loin, et non peut-être à tort. Il doute que la nature du résidu des vases dits de sang ait été établie péremptoirement. Pour lui, il’incline à croire que ces fioles ont contenu des huiles parfumées ou colorées dont on se servait pour l’embaumement des corps ou du vin des agapes, consacré ou non, hypothèse dès longtemps présentée et qui semble plus admissible.

Pourquoi tout dans les catacombes serait-il emblème et symbole ? On ne le comprend pas bien. Les catacombes sont obscures, deux fois inviolables comme propriété particulière ou collective et comme terre religieuse. C’est une cité des morts et une cité exclusivement chrétienne. Des chrétiens seuls y reposent, des chrétiens seuls les visitent. Les fossoyeurs qui creusent les galeries souterraines appartiennent à la hiérarchie chrétienne. Les peintres et les sculpteurs sont des fidèles. Quelle indiscrétion à craindre et quelle nécessité de voiler ses croyances sous des signes mystérieux ? Tout va bien si l’on nous accorde qu’il n’y a pas l’ombre de symbole dans les peintures et les sculptures, mais seulement des images commémoratives de faits bibliques, et très peu de mystères dans quelques signes abréviatifs ou quelques emblèmes consacrés par l’usage et fort clairs pour tous les fidèles. Mais l’école des