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une tige rigide à une surface cent fois plus grande et appliquée à presser une masse de mercure. La violence du choc, par cet artifice, est réduite au centième. La pression du mercure est transmise à des pistons de petite surface maintenus par des forces constantes successivement vaincues, et dont les plus grandes ne dépassent pas 20 kilogrammes.

Le plus difficile est de noter le moment où se déplace chaque piston; à chacun correspond, pour les gaz, une pression déterminée à l’avance. La rapidité du phénomène est telle qu’il ne faut pas songer au chronomètre et que les meilleurs chronographes furent trouvés d’abord insuffisans. Une méthode bien connue charge chaque mouvement qu’il faut noter de procurer l’interruption d’un courant ; cette interruption fait naître une étincelle dont la trace, sur un papier en mouvement, marque l’instant précis du phénomène. Aucune action n’étant instantanée, il faut se résigner à un retard ; peu importerait s’il était constant ; ce sont les différences seules qu’on mesure. Malheureusement, l’étincelle présente des irrégularités dont la loi nous échappe. On a essayé de lui faire percer le papier, marquer une trace blanche sur du noir de fumée, colorer en bleu du cyanoferrure de potassium, rien ne réussit; l’étincelle se détourne, sans cause appréciable, pour frapper le papier à un millimètre quelquefois de la route la plus courte. L’électricité frappe le point qui lui plaît ; c’est la seule loi qu’on ait trouvée.

Rebuté par ces difficultés, M. Marcel Deprez osa revenir à un mode d’enregistrement condamné par d’illustres juges. Le courant interrompu produit un électro-aimant dont l’attraction sur une pièce de fer doux met en marche l’indicateur. Wheatstone et Regnault l’avaient essayé sans succès. Les actions mises en jeu demandaient un temps trop long; M. Deprez a dû les réduire. Bornons-nous à dire que, pour hâter le départ de la pièce aimantée, il parvient à exercer sur elle une attraction égale à dix mille fois son poids, capable, par conséquent, de lui faire parcourir 50,000 mètres dans la première seconde; le trajet est d’un seul millimètre.

La méthode dynamique est venue confirmer les résultats de la méthode statique. L’accélérographe de M. Deprez, — c’est sous ce nom que la commission, en le faisant connaître, l’a recommandé aux artilleurs, — se compose d’un petit piston d’acier d’un demi-centimètre carré de surface qui, traversant l’épaisseur des parois de la pièce, reçoit directement l’action des gaz. A l’extrémité libre de ce piston se trouve une masse très lourde en fer qui porte une petite plaque enduite de noir de fumée, contre laquelle appuie un style soumis à la traction d’un ressort de caoutchouc qui ne