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modernes, seize livres sont consacrés à l’origine de différens végétaux. Les Chinois ont été chercher des plantes jusque dans le Nouveau-Monde. Nous ne parlons pas ici de la Pomme de terre ni du Tabac, qu’ils ont reçus de l’Europe, mais du Maïs, cultivé à Pékin de temps immémorial pour la nourriture des pauvres, et dont l’origine, longtemps controversée, est indubitablement américaine. M. Simon, qui a largement et utilement parcouru les provinces méridionales de la Chine, a pensé même que le Bambou, le Palmier à chanvre et le Taro avaient dû jadis aussi y être introduits. Quoi qu’il en soit de ces trois plantes, ne voilà-t-il pas à l’actif d’un peuple si longtemps et si injustement dédaigné une série d’efforts dont le résultat honorerait grandement, n’importe dans quel état de l’Europe, une société d’acclimatation ? On peut dire assurément que, même dans les pays de notre Occident les plus favorisés de la nature, il n’a rien été fait, surtout rien poursuivi, qui approche de ce qu’a réalisé, en fait d’introductions utiles de végétaux dans l’orient de l’Asie, l’industrieuse persévérance de la race jaune.

Ces détails, qui prouvent avec quel goût les Chinois ont depuis une haute antiquité étudié et recherché les plantes, expliquent surabondamment comment, avec l’étendue du pays qu’ils habitent, ils ont pu rassembler dans leurs livres les noms de cinq à six mille espèces végétales. Ce chiffre approximatif nous est fourni par un savant spécial, M. le docteur Bretschneider, qui habite la Chine et spécialement Pékin depuis plus de quinze ans comme médecin de l’ambassade de Russie. Pendant ce temps, M. Bretschneider, fondé sur une connaissance laborieusement acquise de la littérature chinoise et sur d’obligeantes communications des savans de Saint-Pétersbourg, a profité des trésors contenus à Pékin dans la bibliothèque de la mission ecclésiastique pour donner à l’Europe des documens précieux sur l’histoire, la géographie, l’archéologie, et principalement l’histoire naturelle de la Chine. M. Bretschneider s’est appliqué à étudier, d’après les sources chinoises, les anciens rapports de la Chine avec les nations qui l’avoisinent à l’ouest, et jusqu’avec les Arabes. Si ces pages tombent sous ses yeux, il y reconnaîtra bien vite des détails empruntés à ses propres travaux. Dans un sentiment exagéré de modestie, ce médecin distingué a commencé par écrire, en tête de son plus récent mémoire, qu’il n’était ni sinologue ni botaniste. Il ne lui a manqué sans doute que d’être un peu plus l’un et l’autre pour nous donner la clé de la nomenclature et de la classification botanique en usage depuis un temps reculé chez les lettrés chinois.

Tout à l’heure nous regrettions de ne pas pouvoir mettre sous les yeux de nos lecteurs de ces dessins où maint artiste excelle à Changhaï ou à Canton. Les difficultés de la typographie nous