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les dépenses courantes et qu’on offrait de les remplacer par d’autres sûretés : dès lors, les billets de monnaies, ne furent plus négociés qu’avec une perte qui s’accrut sans cesse. On n’en continua pas moins à les multiplier, et la réforme monétaire ; de 1704 en fit émettre, de nouveaux. Bien que dépréciés, ils avaient encore une circulation : on commença à en émettre directement pour subvenir aux dépenses publiques, sans qu’alors ils eussent pour gages, des matières d’or et d’argent en cours de fabrication.

Pendant que la circulation des billets de monnaies recevait ce développement, la caisse des emprunts émettait ses promesses, et elles étaient bien reçues par le public. Mais, en temps de guerre, le crédit dépend du sort des armes : après la défaite de Hochstedt (12 août 1704), des, remboursemens considérables furent demandés, et il fallut (Arrêt du 17 septembre) les ajourner au 1er avril 1705 : ce fut en vain que, quelques jours avant cette échéance (le 23 mars), pour essayer de déterminer les porteurs à la reculer eux-mêmes, l’intérêt fut élevé à 10 pour 100, et que, pour attirer les étrangers, on exempta du droit d’aubaine ceux qui prendraient des promesses de la caisse des emprunts. Les porteurs de cette valeur se présentèrent en grand nombre le 1er avril et ne purent être payés que moitié en argent, et moitié en billets de monnaies, créés et émis tout exprès à cet effet. Jusque-là ces billets, quoique dépréciés, s’étaient soutenus : mais quand on les vît changer en quelque sorte de nature et servir à rembourser des effets qui n’inspiraient aucune confiance, ils furent entièrement discrédités. Les commerçans en détenaient une quantité considérable : on ne les rassura pas en commençant à en faire du papier-monnaie, en ordonnant qu’ils pourraient entrer pour un quart dans tous les paiemens, alors qu’ils n’étaient pas, reçus par le trésor en acquittement des contributions. Ceux qui ne possédaient pas, d’autres valeurs furent entraînés par la peur ou contraints par le besoin à les négocier à tout prix, et en peu de jours, ils perdirent 75 pour 100. Le commerce fut profondément troublé. C’était l’acquittement des promesses de la caisse des emprunts en billets de monnaies qui avait discrédité ceux-ci ; on espéra vainement les relever en les faisant accepter par cette caisse pour moitié des sommes qu’elle recevait ; elle les donna ensuite en paiement aux fournisseurs de l’état. Mais la plupart des négociant opèrent à l’aide de l’argent, et du crédit. Ce ne sont pas des effets portant intérêt qu’il leur faut. Payés en papier, ils le mettent à tout prix sur la place ; seulement, quand ils peuvent le prévoir, ils ont soin de régler auparavant les conditions de leurs marchés, à raison de la perte qu’ils ont à craindre.

La situation des billets de monnaies fut pendant plusieurs années