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gravité, par leur provenance exotique, par leurs nombreux qualificatifs. On se dit que, n’étant pas très sûres d’elles-mêmes, elles ne prendraient pas autant de titres. Analysez-les cependant, dégagez-les de tout ce pompeux appareil ; considérez-les, non plus au point de vue de leur valeur absolue, mais au point de vue de leur application aux études de nos collèges, et vous verrez ce qu’il en reste. De tout un peu, rien à fond : telle pourrait être la devise de la nouvelle pédagogie. Dans son orgueilleux pédantisme, elle embrasse toutes les sciences ; en réalité, elle ne fait que les effleurer. Dans son ignorance des proportions et des quantités nécessaires, elle a fait de nos études classiques, autrefois si bien ordonnées, un véritable capharnaüm, une sorte d’entrepôt confus et désordonné de toutes les connaissances humaines. Vous lui aviez confié vos enfans dans l’espérance qu’elle formerait avec ceux-ci de fins lettrés et des esprits délicats, ou qu’elle développerait chez ceux-là le goût des vérités positives et l’aptitude scientifique : elle vous rend, au bout de huit ans, des cerveaux bourrés de matières mal digérées, saturés sans être nourris et déjà souvent fourbus ou à tout le moins rebutés. Bref, je vois bien ce que les Charcot de l’avenir y gagneront ; je n’aperçois pas l’avantage qu’en pourront retirer les familles et le pays.


IV

Mais allons plus loin ; passons de ces critiques théoriques à leur démonstration par les faits, les résultats acquis et déjà constatés. On peut médire des examens : de bons élèves y échouent parfois, de mauvais y réussissent. Il y a dans ces sortes d’épreuves une part inévitable de hasard. Toutefois, on ne saurait nier que, pour juger de la valeur d’un enseignement, elles ne soient encore le plus sûr critérium. Tant valent le baccalauréat et la licence, tant valent les études qui y conduisent. Or, c’est un fait constant que, depuis les réformes de 1880, le niveau des épreuves littéraires, tant au baccalauréat qu’à la licence, a baissé d’une façon inquiétante. Les bulletins que les facultés de province ont pris l’excellente habitude de publier sont à cet égard singulièrement concluans. Nous lisions dernièrement dans celui de la faculté des lettres de Poitiers, sous la signature autorisée d’un de ses professeurs, une véritable lamentation sur la décadence de la version latine. Au rapport de ce maître, sur quatre-vingt-neuf copies d’une version des plus simples et des plus faciles, empruntée aux Tusculanes, il ne s’en est pas trouvé, à la dernière session, une seule qui fût « exempte de fautes