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personnel de même valeur. Soit, et nous voulons bien pour un moment accepter l’argument. Mais qu’en restera-t-il si nous prouvons que c’est à Paris même, sous l’œil inquiet de l’administration, malgré les visites répétées de ses inspecteurs dans nos lycées, que le mouvement d’opposition aux réformes de 1880 est le plus vif ? Nous rappelions tout à l’heure la résistance passive, mais résolue, qu’en d’autres temps l’université sut opposer à des entreprises moins dangereuses à coup sûr que l’expérience actuelle. Ce qui se passe en ce moment dans nos collèges est l’exacte répétition de ce qui s’y passa il y a une trentaine d’années. Le corps enseignant, à quelques exceptions près, est manifestement hostile au nouveau plan d’études ; il ne l’applique et ne s’y soumet qu’à contre-cœur ; il en prend le moins et en laisse de côté le plus qu’il peut. Les proviseurs, débordés ou complaisans, n’interviennent qu’avec une extrême circonspection, et dans la mesure qui leur est strictement imposée par leurs fonctions. Certains même ont pris sur eux de rétablir des exercices condamnés par le conseil supérieur et de revenir peu à peu à l’ancienne méthode. Au collège Stanislas, entre autres, la rhétorique est redevenue ce qu’elle était à l’époque des Lemaire et des Boissier ; le discours latin y a été réintégré dans tous ses honneurs ; et le vers latin, lui-même, ce proscrit, a repris sa place à côté de lui. Bref, la réforme s’est heurtée dès le principe à d’invincibles répugnances, et le personnel de nos lycées présente aujourd’hui, dans son ensemble, le spectacle toujours mauvais d’un corps à l’état d’indiscipline latente.

Parlerons-nous maintenant de la faculté des lettres de Paris ? Assurément, car nous ne saurions invoquer une autorité plus considérable. Or, il faut qu’on le sache, la faculté de Paris vient de constater dans un rapport officiel l’affaiblissement progressif des épreuves littéraires aux examens de la licence et du baccalauréat depuis 1880. On n’a pas jugé à propos de publier ce document ; on ne le publiera vraisemblablement pas plus qu’on ne publie les procès-verbaux des séances du conseil supérieur. Toutefois, comme on n’a pu s’empêcher d’en saisir le conseil académique, il se trouve que nous sommes en mesure de le faire connaître, sinon dans sa teneur même, au moins en substance.

Commençons par le bien ; le rapport de la faculté se plaît d’abord à reconnaître les progrès très réels et vraiment notables que les candidats au baccalauréat ont faits depuis quelques années, dans l’étude des langues vivantes. A cet égard, les épreuves tant écrites qu’orales sont des plus rassurantes : A l’écrit qui consiste en un thème de dix-huit ou vingt lignes, lequel doit être terminé en une heure et demie, avec le secours d’un simple lexique, la proportion