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gènes voisins des provinces de la Tartarie sont remarquables par leur haute stature, leur force et leur sauvagerie. La paix, qui n’a pas été troublée depuis longtemps en Corée, et l’oppression exercée par le gouvernement, ont beaucoup contribué à rendre le peuple mou et ignorant. Ils supportent facilement la misère. On croit qu’ils sont à peu près sauvages et dénués d’intelligence : c’est là une erreur née sans doute de leur persistance à ne pas répondre aux questions des étrangers. Ils n’ont jamais été en contact avec d’autres gens que les Chinois et les Japonais, et les relations qu’ils ont elles à différentes reprises avec ces peuples ont toujours tourné à leur désavantage. Aussi détestent-ils les visages nouveaux ; ils font semblant de ne pas les comprendre pour n’avoir pas à leur parler. Au dire des Malais, les singes ne parlent pas non plus pour ne pas payer d’impôt.

Dans l’intérieur, les voleurs sont très nombreux ; ils ne se croient pas déshonorés lorsqu’ils ont été condamnés pour ce fait. À peine hors de prison, ils recommencent. Cela vient de ce qu’aucune loi sévère ne punit le vol. Il n’en est pas de même du viol, qui est châtié très sévèrement. La femme qui entretient des relations avec un étranger est condamnée à mort. Les Japonais en eurent un exemple terrible lors de la famine qui, en 1877, dépeupla une partie du pays. De pauvres femmes affamées vinrent demander des secours aux Japonais établis à Fousan ; quelque temps après, elles furent ramenées par ordre des autorités. On leur trancha la tête. Les Coréens riches allaient aussi, de leur côté, à Fousan, mais c’était pour y admirer les mousmées japonaises, leur offrir des cadeaux et en obtenir des faveurs.

Aussitôt, avons-nous dit, qu’une femme coréenne, — à moins qu’elle ne soit très jeune ou très vieille, — rencontre un étranger, elle s’enfuit, et si la retraite est impossible, elle se voile le visage. Il est à présumer que les Coréennes agissent ainsi plutôt par crainte de leurs compatriotes que des étrangers. Un jour, un officier anglais qui faisait des sondages à Masamfo descendit à terre avec quelques camarades. Deux femmes qui travaillaient seules dans les champs vinrent à eux, les examinèrent longuement et leur adressèrent même quelques paroles qu’ils ne purent comprendre. Un Coréen se montra soudainement à quelque distance, et aussitôt elles prirent la fuite.

Si vous passez près d’un ruisseau, vous trouverez toujours un groupe de femmes lavant et causant ; aussi les Coréens, couverts de vermine dans l’intérieur de leurs maisons, sont-ils toujours, hors de chez eux, vêtus proprement. Tous les travaux domestiques sont faits par les femmes ; la destinée des hommes paraît être celle de fumer et de flâner de la naissance à la mort. Les maisons de bains,