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assurés que la compagnie d’Occident. « Il est constant, dit Forbonnais, que ses actions avaient un avantage décidé par la nature des affaires et des bénéfices qu’elles embrassaient : elle devait gagner le dessus et cela arriva en effet. » C’était pour la compagnie d’Occident une concurrence redoutable que Law avait vue s’établir avec dépit : son désir de la faire disparaître s’accrut encore quand il put croire que la compagnie des fermes n’était pas restée étrangère aux manœuvres qui avaient cherché à causer des embarras à la banque par des retraits d’or considérables et précipités.

Pour obtenir de l’état qu’il annule, après un an de jouissance seulement, le bail passé pour six années à Aymard Lambert, il faut offrir des avantages considérables et il ne suffit pas de porter le prix de ce bail de 48,500,000 à 52 millions. Law propose de prêter au roi à 3 pour 100 1,200 millions, qui seront employés à rembourser les rentes et les autres charges assignées sur les aides et gabelles, sur les tailles, sur les recettes générales, sur le contrôle des actes, sur les postes ; — les 100,000 actions de la compagnie des fermes ; — les billets de l’état et ceux des receveurs généraux, les finances des offices supprimés ou à supprimer. C’est l’extinction de presque toute la dette publique, et le trésor aura à payer à la compagnie une redevance annuelle de 36 millions, au lieu des 48 millions qu’il paie à ses créanciers, pour un capital de 1,200 millions, depuis que les rentes et les autres dettes de l’état ont été réduites à un intérêt de 4 pour 100. L’offre est donc séduisante et elle est acceptée[1]. — La compagnie des Indes est autorisée à emprunter elle-même les 1,200 millions en actions rentières au porteur ou en contrats, à 3 pour 100 d’intérêt par an. — En conséquence, toutes les rentes sont éteintes et supprimées ; les titres seront rapportés au trésor et les rentiers seront remboursés en assignations sur le caissier de la compagnie des Indes : les ordonnances de liquidation des charges supprimées, les billets des receveurs généraux, ce qui reste de billets de l’état,.. etc.,.. seront également présentés au trésor, et transmis au caissier de la compagnie, qui les acquittera[2].

Ce n’était point une entreprise sans difficulté, au point de vue économique et financier, que de rembourser presque immédiatement 1,200 millions aux rentiers et aux créanciers de l’état. Ils pouvaient bien recevoir, provisoirement, en paiement, des billets de la banque ; mais ces billets ne produisant pas d’intérêt, ils étaient obligés de chercher un emploi à des capitaux dont le revenu était pour la plupart leur seul moyen d’existence. Si ces 1,200 millions

  1. Arrêt du conseil du 27 août 1719.
  2. Arrêt du conseil du 31 août.