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richesses que la terre met à la disposition de tous, à l’amélioration des conditions de la vie matérielle ; nos mœurs financières constatent la recherche de ce but constant de nos efforts.

Or, s’il existe dans les habitudes financières du pays une préférence, le public, au moyen des épargnes disponibles, poursuit un bénéfice qui l’attire d’une façon particulière, c’est à coup sûr l’emploi qu’il leur donne dans les affaires qui se font à l’étranger. L’argent français est toujours prêt à émigrer : emprunts d’états, entreprises industrielles, grands travaux publics ou privés, il se laisse facilement séduire pour y participer. C’est un fait notoire, et tous ceux qui ont pu recueillir des renseignemens à cet égard attesteraient par la vue des titres qui remplissent les caisses de nos grandes sociétés financières qu’aucune comparaison ne peut être établie entre le nombre d’étrangers associés aux affaires françaises et celui des Français possédant des titres étrangers. La quantité de ceux-ci est immense. Serait-ce que chez nous le mode d’emplois mobiliers fasse défaut, que notre capital dépasse l’importance des affaires se présentant à lui, que l’offre n’égale pas la demande, ou que les profits n’atteignent pas chez nous les proportions, des entreprises étrangères ? Loin de là, mais il faut reconnaître qu’à cet égard l’imagination joue un certain rôle, que notre caractère se prête aux œuvres de confraternité, que de ce côté comme du côté politique, nous faisons preuve de sympathie et d’absence de préjugés. Sans citer comme un indice du libéralisme français les entreprises si populaires du percement des isthmes de Suez et de Panama, passionnément poursuivies par tous nos capitaux grands et petits, il y a lieu de signaler les participations que nous avons prises dans les emprunts de chaque état, aussi bien en Italie, en Autriche qu’en Russie, en Suède, en Orient, etc. ; il faut reconnaître aussi que, sous des noms étrangers, bien des affaires sont des affaires mi-françaises, telles que les chemins de fer autrichiens et espagnols, dont les titres, actions et obligations sont cotés sur nos marchés, constituent des placemens durables qui persistent, se renouvellent et n’ont rien du caractère de la spéculation.

Les dispositions générales du public étant ainsi connues, il reste, dès qu’une nouvelle affaire se fonde à l’étranger, à rechercher si la contrée où elle se trouve engagée nous attire et si l’entreprise mérite que nous l’encouragions par nos efforts. Ceci constaté, ni l’attention des capitalistes, ni les sollicitudes du public ne lui feront défaut. Or, à cet égard, le titre qui précède ces lignes donne toute assurance, et nous sommes certains de ne point appeler en vain l’intérêt ou la curiosité du public français sur ce que nous nommons le chemin de Constantinople.

Il s’agit ici, bien entendu, non pas de l’extension à donner aux