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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 juin.

Ce n’est point, certes, par une vaine fantaisie ou par un entêtement d’opposition chagrine qu’on est sans cesse ramené à montrer les fautes, les excès de parti, les abus de domination, les imprévoyances qui s’accumulent depuis bien des années déjà dans notre politique française. Après tant d’épreuves et de mécomptes, lorsque les événemens ont si souvent trompé toutes les espérances et confondu la raison, on serait bien plutôt porté à se contenter de peu. C’est, dans le fond, le sentiment le plus saisissable du pays, qui ne demande pas pour le moment qu’on fasse de grandes choses, qu’on l’ébluuisse par d’éclatans succès, qui a tout au moins le droit d’exiger qu’on cesse de le fatiguer de projets stériles, de tyrannies de parti, qu’on lui assure la paix intérieure, une prudente administration de ses intérêts et une position suffisamment honorable dans les affaires du monde. Ce n’est pas trop, ce serait déjà beaucoup d’obtenir qu’on en revînt par degrés à une bonne politique.

Que M. le président du conseil se flatte de répondre par sa diplomatie à une partie de ces vœux, soit, nous ne méconnaissons pas ce qu’il a fait depuis un an pour remettre un peu d’ordre et de suite dans les affaires extérieures de la France. M. le président du conseil, il est vrai, s’est tiré avec une certaine dextérité de ses embarras du Tonkin ; il paraît avoir franchi les pas les plus difficiles par le succès d’une campagne rapidement et heureusement conduite aussi bien que par sa diplomatie. Après le traité de Tien-Tsin, qui écarte le danger d’une guerre lointaine, qui règle nos rapports avec la Chine, il vient de faire signer à Hué un nouveau traité qui constitue déûnitivement le protectorat de la France sur ces vastes contrées de l’Aunam et du Tonkin. Il a su aussi venir à peu près à bout de cette inextricable