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possession de tout le réseau de la Haute-Italie, et par son projet de loi, le ministère demandait l’autorisation d’exploiter directement ce réseau : il en eût été de même du réseau romain et du réseau méridional aussitôt après l’approbation des conventions de rachat. L’exploitation de tous les chemins italiens aurait ainsi passé, à très bref délai, dans les mains de l’état. Mais les hommes d’état qui avaient si habilement conduit ces importantes négociations ne devaient pas avoir la satisfaction de mettre la dernière main à leur œuvre. Avant que le projet de loi présenté par eux pût être discuté, une de ces révolutions ministérielles, alors si fréquentes en Italie, renversa le cabinet Minghetti-Spaventa. Le pouvoir échappait à la droite parlementaire, qui n’a pu le ressaisir depuis lors, et la gauche arrivait enfin aux affaires. La crise ministérielle terminée, le nouveau président du conseil, M. Depretis, ne répudia rien de l’œuvre si habilement accomplie par ses devanciers ; mais aucune disposition n’avait pu être prise en vue de l’exploitation du réseau de la Haute-Italie ; ni le personnel ni les règlemens n’étaient prêts ; aucun crédit n’était inscrit au budget. Aussi fallut-il recourir à un expédient, et par une convention signée à Rome le 17 juin, la Société de la Haute-Italie consentit à continuer encore pendant deux années, c’est-à-dire jusqu’au 1er juillet 1878, l’exploitation des lignes rachetées. Cette convention provisoire fut approuvée, en même temps que le traité de Bâle et l’acte additionnel de Vienne, par la loi du 29 juin 1876, mais quant au système de l’exploitation directe par l’état, il fut repoussé après un débat approfondi qui remplit cinq séances consécutives ; et la chambre introduisit dans la loi un article qui invitait le gouvernement « à présenter dans la session législative suivante et, de toute manière, avant l’expiration de l’année 1877, un projet de loi pour la concession à l’industrie privée des chemins de fer devenus la propriété de l’état. » En exécution de cet article, M. Depretis mit immédiatement à l’étude et présenta, le 20 novembre 1877, un nouveau projet de loi qui avait pour objet de ratifier les conventions de rachat relatives aux chemins romains et méridionaux, et de régler les conditions d’exploitation de tout le réseau italien.


IV

En spécifiant que cette exploitation serait confiée à une ou plusieurs compagnies d’intérêt privé, l’article 4 de la loi de 1876 excluait manifestement toute idée d’exploitation par l’état. M. Depretis, dans la rédaction de son projet de loi, s’était conformé à la pensée du parlement. Il proposait de diviser tous les chemins de fer en deux réseaux séparés qui s’appelleraient réseau Adriatique