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REVUE. — CHRONIQUE.

la politique générale et de l’entente entre les puissances, soit au point de vue des intérêts des créanciers de l’Egypte. Le gouvernement français a résolu de demander à la cour de Pékin une indemnité sérieuse pour la violation du traité de Tien-Tsin. Il est possible que la Chine reconnaisse promptement ses torts et nous donne pleine satisfaction. Il y aurait peut-être toutefois quelque inconvénient à escompter sans plus tarder cette heureuse issue du conflit. Les entrevues de Li-Fong-Pao avec notre ministère des affaires étrangères ne paraissent avoir rien réglé.

La spéculation peut encore moins négliger les indications si défavorables fournies sur notre état économique par les chiffres de notre commerce extérieur, par les recettes des chemins de fer, par le résultat du rendement des impôts pendant le premier semestre de 1884. Le résultat est très peu satisfaisant. Il y a, pour le seul mois de juin, une moins-value de 10 millions sur les évaluations budgétaires. Depuis le 1er  janvier, l’insuffisance atteint déjà 40 millions, et la diminution du rendement, par rapport aux recettes réalisées en 1883, dépasse 15 millions. On ne peut espérer que les chiffres du second semestre comblent le déficit ainsi créé. Le mal ira au contraire en s’aggravant. Le choléra, par les quarantaines et autres mesures sanitaires adoptées par les gouvernemens étrangers et chez nous-mêmes par les autorités administratives et municipales, va entraver sur un grand nombre de points les transactions commerciales. Les transports diminueront encore, les échanges se restreindront, et l’on devra se féliciter si, en fin d’exercice, le déficit ne dépasse pas une centaine de millions. Pendant ce temps, le montant des dépenses se sera certainement accru, le Tonkin et Madagascar réclamant de nombreux millions, et la commission du budget s’évertuant vainement à dresser sur le papier une liste d’économies à réaliser dans les différens ministères, et que l’expérience démontrera irréalisables.

Le seul argument à opposer à ces considérations d’ordre général est l’abondance de l’argent. L’épargne a des disponibilités considérables. Elle a à recevoir depuis le 1er  juillet le montant d’innombrables coupons d’obligations de chemins de fer, et, depuis le 5 courant, elle a pu toucher, sur les valeurs diverses, des coupons dont voici les plus importans : 53 francs sur les actions de Suez, 43 sur les Délégations, 41 sur les Parts civiles, 53 sur le Nord, 80 sur le Crédit foncier, la Banque de Paris et les Omnibus, 25 sur le Midi, le Crédit foncier d’Autriche et la Banque ottomane, 22 sur les Voitures, 20 sur les Magasins généraux de Paris, les Chemins Andalous, les Méridionaux italiens, 18 sur le Nord de l’Espagne, 15 sur la Compagnie transatlantique et sur les Portugais, 13 sur le Saragosse, 12 sur les Autrichiens. Presque tout cet argent se reporte immédiatement sur les rentes et les obligations de chemins de fer.