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du percement projeté du Gothard, on parlait en Suisse de percer de préférence le Lockmanier, le Splugen ou d’autres cols ; de même aujourd’hui, en France, la lutte est ouverte entre trois ou quatre projets qui tous réclament un nouveau tunnel afin de faire concurrence au Gothard.

Le Simplon. — Parmi ces divers projets, le seul qui ait été réellement bien étudié, le seul qui mérite de fixer l’attention, est le projet d’un tunnel par le Simplon. Le tunnel du Simplon » que les cantons de langue française, Genève, Vaud, Valais, Neuchâtel, Fribourg préféraient naturellement à celui du Saint-Gothard, réclamé par les cantons allemands et le canton italien du Tessin, a toujours eu la préférence aussi près la plupart des ingénieurs français, et ce projet a joui en France, à diverses reprises, d’un certain renom, d’une sorte de popularité, même parmi nos législateurs et nos hommes d’état. Le passage par le Simplon a déjà failli l’emporter sur celui du Saint-Gothard au temps où ce dernier était en discussion. Reconnaissons toutefois que la position du Saint-Gothard, au centre des Alpes, était meilleure, surtout pour l’objet qu’on, se proposait et qui était non-seulement de percer le massif alpin pour dégager la Suisse. mais encore d’unir par une voie de fer continue, allant du nord au sud, l’Allemagne, la Suisse et l’Italie. Le Saint-Gothard sera toujours le plus favorisé, à moins que l’avenir ne décide pour l’Arlberg, Quant au Mont-Cenis, il sera fatalement toujours au dernier rang, et déjà le Gothard l’emporte sur lui pour le transit venant du nord ou du nord-est de la France.

C’est à l’année 1852 que remonte le premier projet de percement du Simplon. Un groupe de financiers et d’entrepreneurs français obtint alors du Valais et de la Confédération suisse la concession d’une ligne ferrée partant du lac Léman, remontant la vallée du Rhône, et traversant les Alpes au Simplon. Ce projet n’eut pas de suites. En 1857, deux ingénieurs valaisans présentèrent le premier devis pour la traversée du Simplon ; puis vint M. Eugène Flachat, ingénieur français, en 1860. La même année, M. Vauthier, ingénieur des ponts et chaussées, frappé de la faible épaisseur relative que présente au Simplon le massif des Alpes, reconnut que, sur toute la chaîne, du Mont-Cenis au Tyrol, le Simplon était le seul point où l’on pût attaquer par un tunnel la montagne au-dessous de 1,000 mètres, sans dépasser une longueur qui ne fût pas exécutable, et il fixait le côté pratique de ce travail par le fonçage d’un tunnel au niveau le plus bas possible de la montagne, à 743 mètres d’altitude, ayant 18,220 mètres de long, et qu’il appelait un tunnel de base, par opposition aux autres, qui sont des tunnels de faîte. De 1862 à 1878, divers ingénieurs présentèrent