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la nutrition même, tombaient sous la dépendance directe, non plus du sympathique, mais du système de la vie animale. La systématisation fonctionnelle établie dans les attributions des deux systèmes nerveux s’écroulait sous l’effort de l’expérience. Et c’est précisément ce moment, vers 1860, qui marque la décadence de la conception des deux systèmes nerveux. Mais, sur ce point, l’expérience du lendemain devait infirmer l’expérience de la veille. Nous avons montré que les agens dilatateurs appartiennent, en réalité, au sympathique au même titre que les nerfs constricteurs. A cet égard, le système sympathique, dont la définition s’élargit, est un système mixte ou un système double contenant à la fois les deux catégories d’instrumens nerveux capables de régler le cours du sang, aussi bien ceux qui l’activent que ceux qui le ralentissent. L’unité de l’appareil nerveux circulatoire, tout à l’heure rompue, se rétablit : dans toutes ses parties, il ressortit au système de la vie de nutrition, au nerf de la vie organique ou involontaire.

Il serait facile de prouver que la conception de Bichat et de Buffon, — car elle remonte jusque-là, — loin d’être inutile à la science, a rendu, au contraire, d’éminens services dans l’ordre de la recherche plus encore que dans l’ordre des explications, et que, pour l’avoir méconnue, beaucoup d’expérimentateurs sont tombés dans des erreurs qu’elle leur eût épargnées. Qu’il suffise de dire, puisque aussi bien c’est le dernier résultat qui se rattache à l’histoire de la circulation, que cette doctrine des deux vies et des deux systèmes nerveux, appuyée sur des expériences et des faits, développée et précisée dans ses détails, doit reprendre dans la physiologie contemporaine le rang et la place qu’elle a toujours mérité de garder. Cette acquisition récente vient clore la troisième période de l’histoire de la circulation. A considérer la longue suite d’efforts que nous avons racontés et les succès qui les ont couronnés, on pourrait croire que cette histoire est finie et que le problème est résolu. Nous le dirions nous-mêmes si nous ne savions que dans les sciences de la nature rien ne finit jamais, et que chaque découverte n’est que l’introduction à quelque découverte nouvelle que l’avenir tient en réserve.


A. DASTRE.