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de temps, l’argent remboursé par les propriétaires aurait constitué un fonds de roulement qui serait aussitôt employé à reconstituer une nouvelle série de plantations.

Il est évident que la proposition du député de Toulon aurait facilité la création d’une caisse de crédit viticole ; les secours auraient été immédiats, auraient-ils été suffisans ? Nous ne le pensons point, car les capitaux engagés dans cette opération se seraient tenus dans les limites de la garantie d’intérêt assurée par le texte même de la loi, et, en admettant que chaque année la même somme eût été votée par le parlement, il aurait toujours fallu quatre ans pour qu’une somme de 100 millions fût mise à la disposition des viticulteurs. Or nous ne devons point perdre de vue que la somme dont ils ont besoin en ce moment dépasse 1,500 millions, que la tache phylloxérique s’étend de plus en plus, et qu’enfin les ressources de l’état et des particuliers diminuent chaque jour. C’est peut-être pour cela que la commission d’initiative a cru prudent de réserver la solution de la question et qu’elle a craint, par un vote de principe, d’engager outre mesure les ressources du budget ordinaire.

Nous ne saurions donc trop conseiller à M. Maurel de reprendre sa proposition et de lui donner toute l’ampleur que comporte le désastre qu’elle est appelée à réparer. Si le budget ordinaire ne peut rien lui donner, qu’il propose un emprunt. Car il faut promptement se résoudre à d’importans sacrifices, si l’on veut provoquer en temps utile la replantation avec des cépages américains des 1,500,000 hectares déjà détruits.

Conformément à l’idée première émise par M. Maurel, une partie de l’emprunt serait consacrée à faire aux viticulteurs des avances remboursables, avec ou sans intérêts, dans le délai de six ans. L’état pourrait même ne pas donner l’argent lui-même et se contenter d’en garantir les intérêts, soit au Crédit foncier, soit à toute autre compagnie financière dont les risques quant aux sommes avancées seraient nuls, puisqu’elles représenteraient à peine le prix du sol, et que les plantations effectuées sous un contrôle sérieux doubleraient ou tripleraient la valeur du fonds. Après cette période de six années, les vignobles reconstitués étant en plein rapport, la garantie de l’état deviendrait inutile, et les propriétaires se libéreraient graduellement au moyen d’annuités fixées d’avance, suivant le système adopté par le Crédit foncier. La seconde partie de l’emprunt serait affectée à payer : 1° des primes annuellement accordées pendant quatre ans à toutes les plantations de vignes américaines, sur le pied de 125 francs par hectare. Ces primes, représentant à peu près la valeur des frais de culture, seraient délivrées sur le rapport d’agens spéciaux chargés de constater le bon état d’entretien des jeunes vignes ; elles seraient refusées à