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REVUE LITTERAIRE

LES PETITS NATURALISTES

Il y en a plusieurs, il y en a même beaucoup, et, sans être accusé pour cela de souhaiter la mort de personne, on peut bien dire qu’il y en a trop, puisqu’à peine entre eux tous ont-ils du talent comme quatre. Les uns, — ce sont les délicats, à moins que ce ne soient les timides, — imitent ce qu’ils peuvent de la manière de M. Daudet : M. Alain Bauquenne, par exemple, ou M. Léon Allard. D’autres, plus raffinés, et qui trouvent apparemment M. Daudet trop simple, aiment mieux s’égarer sur les traces de M. Edmond de Goncourt : tel est l’auteur de la Robe du moine et de Ludine, l’étonnant M. Francis Poictevin, celui qui se fait écrire par M. Taine des « choses » que M. Paul Alexis, qui s’y connaît, n’hésite pas à déclarer « médiocres. » Mais le vrai maître de l’école, aujourd’hui comme au temps des Soirées de Médan, c’est M. Zola, toujours, et par-delà M. Zola, c’est Flaubert, encore Flaubert, éternellement Flaubert, et surtout le Flaubert de l’Éducation sentimentale et de la Tentation de saint Antoine. On prend ses modèles où l’on peut, et quand on veut des grands hommes à soi, on se les fait. Il est certain d’ailleurs que M. de Goncourt aura beau multiplier les préfaces apologétiques, ou M. Champfleury revendiquer les droits des Bourgeois de Molinchard, le procès est désormais jugé, et bien jugé : c’est Flaubert qui demeurera dans l’histoire littéraire de ce temps le vrai héraut du naturalisme, comme il est bien probable que Madame Bovary en demeurera le chef-d’œuvre. Pour moi, je joindrais