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aux environs de 40 francs, inspirait peu de confiance aux capitaux ; les émissions d’obligations tentées par la Société ou échouèrent ou se firent à des taux désastreux : elle se trouva dans l’impuissance d’entreprendre de nouveaux travaux ; le gouvernement dut se charger de construire lui-même la ligne de la Ligurie, dont il confia l’exploitation à la Société de la Haute-Italie, dans le réseau de laquelle elle est demeurée jusqu’à présent.

Presque chaque année fut marquée par un remaniement des conventions financières entre l’état et la société sans que celle-ci réussit à acquérir des élémens suffisans de vitalité, parce que la situation du marché des capitaux ne s’améliorait que lentement et parce que les résultats effectifs du trafic étaient loin de répondre aux espérances du gouvernement et aux calculs de ses ingénieurs. De nouvelles complications surgirent, et, après 1870, lorsque le gouvernement italien, ayant quitté Florence pour Rome, voulut remanier les lignes qui aboutissaient à la nouvelle capitale et donnera leurs établissemens des dimensions en rapport avec le surcroît d’importance qu’elles acquéraient, la société se refusa à des dépenses qui n’étaient pas prévues dans ses contrats et qui, nécessaires peut-être au point de vue politique, ne pouvaient ajouter aux produits de son exploitation. Il en résulta des contestations sans fin, dont on crut ne pouvoir sortir que par la voie d’un rachat.

Cette issue répugnait d’autant moins au gouvernement italien qu’il inclinait, à ce moment, vers le système de l’exploitation par l’état et qu’il regardait comme indispensable de remanier le groupement des lignes italiennes. Or l’existence de la Société des chemins de fer romains, interposée entre le réseau de la Haute-Italie et le réseau dont on pressait l’exécution dans les provinces napolitaines, mettait obstacle à la réalisation de ce projet. Des négociations en vue d’un rachat furent donc ouvertes, et elles aboutirent, sous le ministère Minghetti-Spaventa, à la convention du 17 novembre 1873, qui fixa les conditions auxquelles l’état se rendait acquéreur de tout le capital-actions de la Société et le payait par la remise de rentes italiennes. Les conditions stipulées en 1873 n’ont subi aucune modification, mais la loi destinée à les consacrer a été vainement présentée pendant plusieurs sessions successives : elle n’a été votée définitivement et sanctionnée par les pouvoirs publics que le 29 juin 1880. D’après cette loi, l’exploitation que la société avait provisoirement continuée depuis 1873 devait prendre fin le 31 décembre 1881. Le gouvernement italien, en effet, a assumé la direction de cette exploitation le 1er janvier 1882, et, le même jour, la Société générale des chemins de fer romains a cessé d’exister autrement que comme un syndicat de créanciers de l’état.