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pour elle une perte sèche de 600 francs par kilomètre sur l’ensemble des sommes dont elle dispose pour servir sa dette et rémunérer son capital. A l’inverse des autres compagnies qui font tous leurs efforts pour accroître leur trafic, la Société des chemins de fer de l’Italie méridionale a tout intérêt à ce que le sien demeure stationnais ; elle en suit les progrès avec inquiétude et elle ne fait rien pour le développer. Néanmoins, elle a fait jusqu’ici honneur à tous ses engagemens et a distribué régulièrement à ses actionnaires un dividende de 5 pour 100.

Il y a peu de chose à dire des chemins de fer de la Sardaigne, que rien ne rattache aux lignes continentales. Leur longueur totale doit être de 445 kilomètres, sur lesquels 365 sont actuellement construits et exploités. Ils ont été concédés, par une loi du 4 janvier 1863, à une société spéciale, qui s’intitule : Société royale des chemins de fer sardes, et au secours de laquelle l’état a dû venir à deux reprises par les lois du 28 août 1871 et du 20 juin 1877. Malgré toute l’économie apportée dans l’exploitation de ce petit réseau, les dépenses dépassent encore les recettes de 20 pour 100 : le déficit est comblé par la subvention de l’état. Comme il n’est question d’apporter aucune modification aux conventions de 1877, nous n’avons pas à nous occuper des lignes sardes.


III

Si l’on a suivi avec quelque attention l’historique qui précède, on a dû voir que, par la loi de 1864, qui avait l’importance et le caractère d’une loi organique, et par les lois complémentaires de 1867 et de 1868, le gouvernement italien avait cru régler définitivement le régime des chemins de fer de la Péninsule. Son attente fut trompée, et la cause de cette déception doit être cherchée principalement dans la situation financière de l’Italie et dans la dépréciation du crédit de l’état.

Le gouvernement regardait la prompte construction des chemins de fer comme indispensable à l’affermissement de l’unité italienne : il faisait étudier les lignes à établir beaucoup moins au point de vue du trafic qu’elles devaient donner et de l’assistance qu’elles pouvaient apporter au développement du commerce intérieur qu’au point de vue stratégique, se préoccupant surtout d’assurer la défense des côtes et de relier entre elles et avec la capitale les positions qui permettraient de comprimer le plus aisément toute tentative d’insurrection. Il pressait les compagnies de pousser activement leurs travaux, mais celles-ci, depuis qu’on en avait éliminé tout élément étranger, ne pouvaient se procurer de capitaux qu’à des conditions très