Page:Revue des Deux Mondes - 1884 - tome 65.djvu/192

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

récente, l’institution de la « commune autonome. » A part toute considération de principe, il a suffi d’évoquer les souvenirs de la commune de 1793 et de la commune de 1871 pour faire écarter cette combinaison, qui ne peut compter que sur une chance révolutionnaire pour s’imposer de nouveau par la force et par la terreur. L’organisation indépendante des vingt arrondissemens, pour la gestion des affaires communales, paraîtra sans doute digne d’être discutée ; elle présenterait peut-être certains avantages ; mais, quand on arrivera à l’examen des détails d’application, il est à craindre que le législateur ne soit arrêté par l’impossibilité absolue de briser l’organisme parisien, de scinder les budgets, les ressources et les dépenses et de mettre Paris en morceaux. Rien ne prouve que l’on parerait ainsi au péril politique, et il est à peu près certain qu’au point de vue purement administratif, la population n’y gagnerait pas. Le débat utile ne s’établira que sur la fixation nouvelle des attributions respectives du pouvoir municipal et de l’autorité centrale, sur la mesure des droits qu’il conviendra de répartir entre le conseil élu et le gouvernement. C’est une question de mesure plutôt qu’une question de droit, et, pour la décision, les faits et les intérêts l’emporteront sur les principes.

Il est un fait certain, c’est que, sous tous les régimes politiques, il a été jugé nécessaire d’organiser, pour la ville de Paris, une administration spéciale. Paris n’a jamais été traité à l’égal d’une commune ordinaire. Ville capitale, siège du gouvernement, Paris recueille le bénéfice et il paie la rançon de cette situation exceptionnelle. Il est vraiment superflu d’expliquer et de justifier ces précédens. Aujourd’hui, comme par le passé, les pouvoirs publics sont résolus à maintenir, entre Paris et les autres communes de France, une distinction fondée sur des motifs d’ordre général et sur l’intérêt même de la grande cité.

Cette résolution peut-elle être ébranlée par l’expérience de la législation libérale qui date de 1871 ? Le suffrage universel a-t-il donné des résultats qui soient de nature à recommander l’extension des attributions accordées au conseil municipal ? Il est malheureusement trop facile de répondre à cette double question. Les délibérations et les votes du conseil municipal sont là pour attester que ce conseil a la prétention d’être, avant tout, un conseil politique, et que, dans maintes occasions, la passion l’entraîne hors du domaine purement administratif. Il y a eu quatre élections depuis 1871 : à chaque élection, le caractère politique du conseil s’est de plus en plus manifesté. L’assemblée qui siège à l’Hôtel de Ville n’est point un conseil municipal ; elle est et veut être un second parlement, et elle se comporte en conséquence. L’usurpation est