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seraient venus d’Hawaïki, et plus tard leur population aurait été accrue par l’arrivée d’émigrans partis du cap oriental de la Nouvelle-Zélande, les canots ayant été poussés au large par un vent de nord-ouest. On dépeint les Morioris comme des hommes moins grands que les Néo-Zélandais, ayant la peau plus foncée, la même chevelure droite et dure, le visage plus arrondi et d’une expression plus agréable. On ne les vit jamais tatoués. Au temps où ils vivaient tranquilles, c’était un peuple gai, enjoué, épris de chants et de récits d’histoires plaisantes. Fort imprévoyans et peu sensibles aux intempéries, ils ne bâtissaient point de huttes et se contentaient, pour se garantir contre le vent, d’un rideau de branches d’arbres fichées en terre. Leur idiome présentait un mélange de la langue originelle et de celle des Néo-Zélandais.

Les Morioris ont raconté que leurs ancêtres hawaïkiens trouvèrent, en débarquant à Chatham, une population qui était d’une race particulière. Ces premiers occupans, suivant les traditions, avaient une plus haute stature et un teint plus foncé que les Morioris. Ils faisaient remonter à trente générations l’arrivée de leurs pères et attribuaient leur origine à un chef du nom de Rongomaï, dans leur opinion un héros ou un dieu. Les envahisseurs eurent à soutenir des luttes avec les maîtres du sol ; les deux partis cependant ne tardèrent pas à se confondre et à ne plus former qu’un seul peuple. Divers auteurs présument que les habitans primitifs de l’île Chatham étaient de la race qui dominait à la Nouvelle-Zélande antérieurement à la migration de Hawaïki. A cet égard, tout se borne à une conjecture.


V

Tandis que les derniers des Maoris, parqués sur des espaces circonscrits, s’éteignent avec une désolante rapidité, les colons anglais, maîtres du pays, rayonnant dans la prospérité, occupent les endroits qui réunissent le plus d’avantages. Des villes importantes ont été bâties sur les points les mieux situés du littoral ou des cours d’eau. De vastes domaines agricoles ont été créés. La Nouvelle-Zélande est maintenant une terre européenne, où la population s’agite sans nul souci des anciens aborigènes. C’est une dépendance de l’Angleterre, une colonie qui, depuis sa fondation, a fait d’immenses progrès. La douceur du climat, la fertilité du sol, l’étendue des forêts, la présence des matières les plus précieuses pour l’industrie, l’indépendance et la sécurité que donne une position insulaire, ont marqué les îles les plus voisines de nos antipodes comme une région privilégiée. Longtemps l’Angleterre, toute aux soins de