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étroite qu’elle ne sera atteinte qu’avec une extrême difficulté. Moins le torpilleur est grand, moins il court de risques, moins il est exposé à périr.

Il est donc bien clair que la première condition qu’on doit se proposer en construisant un torpilleur, c’est de le réduire aux dimensions les plus faibles. Pourvu qu’il soit capable de naviguer partout et en tout temps, pourvu que son appareil militaire soit disposé commodément pour la manœuvre, lui demander autre chose est une véritable folie. Mais on affirme que la navigation sur les petits bateaux est une chimère. C’est oublier l’exemple de toutes ces flottilles antiques, dont l’amiral Jurien de La Gravière a raconté l’histoire ; c’est oublier aussi que Christophe Colomb, a traversé l’océan et découvert la Nouveau-Monde avec de simples caravelles. Le torpilleur de 33 mètres et de 45 tonneaux est, quoi qu’on en dise, un bateau très marin, propre à tous les voyages. Il faut reconnaître toutefois qu’on y est fort mal logé, et que les torpilles y sont tellement à l’étroit que la manœuvre en devient parfois malaisée. Pour remédier à cet inconvénient, il aurait suffi de faire des torpilleurs de 36 à 37 mètres ; on a été d’emblée jusqu’au torpilleur de 41 mètres et de 71 tonneaux. Pourvu que ce dernier type ne soit pas dépassé, qu’il soit le terme, non le commencement des agrandissemens, il ne faudra pas se plaindre. Le torpilleur de 41 mètres sera encore un microbe, et cependant personne n’osera dire qu’il ne puisse affronter l’océan. Acceptons-le donc comme type définitif du torpilleur. Nous demanderons seulement qu’on lui donne une vitesse au moins égale, sinon supérieure à celle des torpilleurs 63 et 64, soit 21 nœuds au maximum. Mais nous voulons parler d’une vitesse réelle, non d’une vitesse obtenue seulement pendant les expériences. Dans les essais de recette qu’on fait aujourd’hui, on ne prend pas les navires en pleine charge, avec leurs équipages, leurs approvisionnemens, leur matériel. Il en résulte que la vitesse vraie est toujours inférieure de quelques nœuds à la vitesse officielle. Tel torpilleur livré, qui a donné, par exemple, 21 nœuds aux expériences, n’en file plus que 19 et même 18 lorsqu’il a reçu son chargement complet. Or, comme la vitesse est la première des conditions de succès pour un navire de guerre, toute erreur sur la vitesse est d’une incontestable gravité. Il est permis d’espérer que nos torpilleurs ne s’arrêteront pas à 21 nœuds. On a déjà parlé de torpilleurs capables de filer 25 nœuds. On parle enfin de chaudières qui leur assureront peut-être cette vitesse supérieure, ce sont les chaudières dites Belleville, Elles sont plus légères que les autres ; elles peuvent supporter des pressions de 12 à 15 atmosphères, alors que les chaudières actuelles ne dépassent pas 9 atmosphères ; enfin on les chauffe sans danger à l’eau