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nationalité étrangère annexées. Telle est l’opiniâtreté mise à cette œuvre de germanisation que, dans un temps assez proche, les sujets d’origine étrangère seront fondus dans la masse du peuple allemand. Sur un total de 45,234,061 individus recensés au dernier dénombrement du 1er  décembre 1880, les Allemands figurent pour 41,512,000, les Polonais pour 2,860,000, les Français pour 300,000, les Danois pour 150,000, les Lettons pour 150,000, les Wendes pour 137,000, les Tchèques pour 54,000 individus. Certainement le nombre de sujets allemands non Allemands d’origine, dépasse de beaucoup ce total officiel de 3,722,000. Jusqu’aux bords de l’Elbe, dans la marche de Brandebourg, en Poméranie, en Silésie, dans la Posnanie et dans les deux provinces de Prusse, le fond de la population a du sang slave dans les veines. Or, cette population compte actuellement 13 millions d’individus sur un total de 27,279,111 habitans pour tout le royaume de Prusse. Prétendre que les 13 millions d’habitans des provinces de l’est de la monarchie prussienne, Berlin non excepté, sont Slaves, serait exagérer les choses. Mais un fait incontestable, c’est que, dans ces provinces, la proportion des individus d’origine slave dépasse de beaucoup les chiffres avoués dans les dénombremens faits d’après la langue parlée. Grâce à l’école obligatoire et aux mesures prises de longue date contre les langues étrangères, tous les sujets de l’empire arrivent à parler l’allemand au détriment de la langue maternelle. Par suite, le nombre des habitans non allemands paraît diminuer d’un recensement à l’autre, quand pourtant les familles polonaises de la Haute-Silésie et de la province de Posen se montrent aussi prolifiques que les descendans des colons allemands établis à leurs côtés. La natalité, pendant l’année 1882, a atteint la proportion du 41 pour 1,000 dans les provinces au-delà de l’Elbe, avec prédominance de sang slave, contre 37 dans les provinces occidentales de la Prusse, à sang germanique moins mélangé. Dans la province de Posen, polonaise par excellence, l’excédent des nais-sances sur les décès s’élève dans le courant de la même année à 15 par 1,000 habitans au lieu de 12 pour le royaume de Prusse et de 11 pour la moyenne de tout l’empire allemand.

Considérées au point de vue politique et national, les provinces à l’est de l’Elbe sont germanisées bien plus que l’Alsace, où la plus grande partie de la population n’a jamais cessé de parler allemand. Les Slaves ont eu en possession complète, à une certaine époque, toute la Saxe, une partie considérable du Hanovre et une bonne portion de la Franconie. Après leur refoulement sur la rive droite de l’Elbe, où ils se maintinrent, la Poméranie et la Silésie se germanisèrent pacifiquement à la suite de l’introduction du christia-