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souvent confondu, en le faisant, deux intérêts qu’il eût été bon de distinguer. Il était urgent, cela est évident, de rendre aux dépenses d’exploitation des régies leur caractère de dépenses publiques, mais fallait-il les jeter sans ordre dans le gouffre des dépenses de l’état ? L’unité est un principe de clarté, nous l’avons dit tout à l’heure, il ne faut donc pas l’appliquer de manière à produire l’obscurité. On a remplacé depuis, et avec avantage, cette unité intérieure qui pouvait bien n’être qu’une confusion, par une diversité d’opérations spéciales qu’on a rattachées ensuite au budget par un lien très direct. Le bâtiment est toujours resté sous la forme d’un seul corps de logis, mais on en a distribué l’intérieur en appartenions.

Notre budget actuel est plein de ces sortes de distributions intérieures, et l’avenir prépare beaucoup d’autres nécessités d’aménage-mens analogues, s’il doit, par exemple, augmenter encore les attributions de l’état et le charger de diriger pour le compte des individus certaines industries, comme la Banque, les Transports, l’Éclairage public et tant d’autres services. Nous avons des budgets spéciaux qui contiennent les recettes et les dépenses de la Monnaie, de l’Imprimerie nationale, de la Légion d’honneur, des Chemins de fer de l’état, des Lycées, qui ne figurent au budget que pour des soldes, mais dont on peut étudier les détails en pénétrant dans le compartiment qui leur est réservé beaucoup plus facilement que si leurs dépenses étaient confondues avec les dépenses générales et leurs recettes avec les recettes générales de l’état. Il aurait pu en être de même de l’administration des Tabacs, qui est une industrie, et dont les recettes ne constituent un impôt que parce que le bénéfice est excessif et se défend contre la concurrence par une loi de monopole d’une sévérité extrême. Ici le principe de l’unité a été, par une application maladroite, une cause de désordre dont se sont emparés certains esprits étroits. En additionnant les dépenses de l’administration des Tabacs avec celles de l’état, on a formé un gros chiffre sur lequel on a tenté d’opérer des retranchemens pour diminuer les dépenses publiques. Ou a cherché à réduire le budget des Tabacs comme si les dépenses n’en étaient pas industrielles ; on a substitué, dans cette recherche, l’esprit administratif à l’esprit commercial.

Mais si on a, dans quelques cas, mal appliqué le principe, on a tiré de l’unité les plus grands avantages. Ou a pu maintenir en évidence le rapport des dépenses avec les recettes, et réunir dans une même loi de finances deux ordres d’idées qu’il est bon de ne pas confondre, mais dont le rapprochement offre une garantie des plus sérieuses.

La loi de finances est une loi qui donne des ordres, qui prescrit