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La surface totale de la voilure d’une galère senzille, — c’est-à-dire d’une galère ordinaire, était évaluée à 518 mètres carrés, — à peu près le cinquième de la voilure d’un vaisseau de 74 canons. Le centre de voilure se trouvait placé à 3m, 12 en avant du milieu du navire et à 10m, 73 au-dessus de la flottaison. La plus grande voile de mesure, celle qui se portait avec l’espigon, — sorte de bout-dehors de bonnette, — s’appelait le grand-marabout. Elle avait 50 faix, — autrement dit 50 laizes, — et employait de 1,050 à 1,060 mètres de cotonnine simple. La seconde voile portait le nom de maraboutin : on la faisait de cotonnine double, avec 44 faix et 860 mètres environ d’étoffe. Puis venait la mizaine ou méjane, voile de 36 faix et de 780 mètres de cotonnine double. Après la mizaine, si le temps forçait encore, on enverguait la voilette ou boufette, voile de cotonnine double comme la mizaine et le maraboutin, mais dont la confection n’employait que 28 faix et 380 mètres de toile. Une dernière voile, la moindre de toutes, voile de gros temps, voile de cape, se nommait le polacron. Le mât d’avant portait aussi, suivant la force de la brise, une grande ou une petite voile. Le grand trinquet contenait 38 faix et 660 mètres de cotonnine simple ; le petit trinquet, ou trinquenin, voile de cotonnine double, avait, à peu de chose près, les dimensions du maraboutin ; il se composait de 28 faix, comprenant 384 mètres de toile. Le tréou, voile carrée, exigeait 34 faix et 384 mètres de cotonnine double.

En l’année 1700, on estimait qu’il fallait trois mois pour construire une galère, en y employant soixante-dix ouvriers. Le prix de la construction et de l’équipement était évalué à 54,000 livres ; le radoub annuel, à 2,000 ; la solde, à 2,606 livres par mois. Le capitaine recevait également chaque mois pour sa table 500 livres, l’écrivain en touchait 50 ; l’aumônier, le chirurgien et le remolat, 30 ; le barillat et le maître d’hache, 15 ; les pertuisaniers, 9 ; les proyers, 4 1/2[1]. Je m’arrête : les documens abondent ; si l’on voulait tout citer, des volumes ne suffiraient pas.

La galéasse, comme l’a fort bien fait remarquer M. Jal, ne fut d’abord qu’une galère plus grande et plus forte que la galère commune, un bâtiment plus long, plus large et plus haut d’un tiers environ, avec le même nombre de rames, — un peu plus espacées cependant, — trois arbres au lieu de deux et un timon à la façon du gouvernail des naves. Vers la fin du XVIe siècle, cette galéasse devient en quelque sorte un bâtiment mixte : elle tient le milieu entre la galère et le galion. C’est encore un navire à rames, mais

  1. Traité de commerce, par II. Dieul, ouvrage manuscrit portant la date de 1700. Cet ouvrage m’a été fort obligeamment signalé par H. Labrousse, ancien lieutenant de vaisseau, qui a bien voulu m’es adresser loi-mime quelques extraits.