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notablement les conditions physiologiques de climat et de culture qui ont jusqu’ici assuré l’abondance du rendement de nos vignobles méridionaux, et peuvent se résumer ainsi : milieu humide et chaud pour les racines végétant dans le sous-sol à l’abri de l’évaporation et du refroidissement extérieur par le fait du binage ; milieu sec et chaud pour les pampres et les feuilles se développant librement dans l’atmosphère.

Dans ces conditions, les arrosages pratiqués, comme je viens de l’indiquer, par voie souterraine, ne sauraient être répétés très fréquemment. On ne devra probablement en faire qu’un, deux au plus par an ; et cette considération vient se joindre à celles qui m’ont déjà engagé à proposer de combiner en une seule opération l’arrosage, la fumure et l’emploi de l’insecticide.

Ainsi donc, en me résumant quant au but essentiel de cette étude, l’utilisation des canaux d’arrosage réclamés par notre agriculture méridionale, on voit que ces canaux pourraient lui servir à trois usages distincts, — la submersion hivernale des vignes, l’irrigation estivale des cultures fourragères ou maraîchères, et enfin l’irrigation spéciale des vignes, — exigeant des quantités d’eau très différentes.

Dans le cas de la submersion, le volume d’eau à employer dépendant de la perméabilité du sous-sol est très variable. Il est certains terrains où, dit-on, 6,000 mètres cubes à l’hectare seraient suffisans. Mais, dans le plus grand nombre de cas, il en faut beaucoup plus : sur les vignobles de la rive droite du petit Rhône dont je parlais tout à l’heure, desservis par le canal d’irrigation de Beaucaire, la consommation moyenne a atteint et souvent dépassé 30 et 40,000 mètres cubes à l’hectare, et je ne crois pas qu’il soit prudent de se tenir au-dessous d’une prévision minima de 12,000 mètres cubes qui, rapportée à la durée totale de la période annuelle pendant laquelle on peut utilement faire des submersions, du 15 octobre au 15 mars au plus tard, correspond à l’écoulement continu d’un litre d’eau par seconde pendant cent cinquante jours consécutifs. Or ce débit de 1 litre par seconde est précisément celui que nous savions déjà être nécessaire pour entretenir la végétation des cultures fourragères pendant la durée de la saison sèche, comprenant les sept autres mois de l’année, durant lesquels la surface du sol reçoit et évapore, plus qu’il ne les utilise, environ 18,000 mètres cubes d’eau par hectare.

Au point de vue de ces deux premiers services, les seuls dont on ait paru se préoccuper dans les études faites jusqu’à ce jour, une dérivation d’un débit constant et uniforme peut être considérée comme pouvant à la fois arroser en été et submerger en hiver autant d’hectares qu’elle débita de litres d’eau par seconde.