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points : Toulouse et Bordeaux en tête, avec 200 étudians chacun, Montpellier, Nancy, Besançon ensuite avec des chiffres qui varient de 100 à 120. A Paris surtout, le mouvement a pris des proportions vraiment inespérées : 431 étudians en sciences et 738 en lettres, presque autant qu’aux XIIe et XIIIe siècles, à l’époque brillante où la Montagne Sainte-Geneviève et les échoppes de la rue du Fouarre étaient célèbres dans le monde entier.

Sans doute, il faut toujours se défier de la statistique, et ces chiffres, à les serrer de près, pourraient bien perdre un peu de leur opulence. Il n’y a pas de régiment si bien tenu qui n’ait ses non-valeurs ; à plus forte raison, dans ce bataillon de près de 1,200 jeunes gens qui ne sont astreints à aucune discipline et à aucune surveillance, le nombre des assidus doit singulièrement différer de l’effectif inscrit. Combien vont signer au registre sans entrer dans les salles de conférences, et parmi ceux qui les suivent, combien prennent réellement part à leurs exercices ? D’après des informations que j’ai lieu de croire exactes, sur les 700 noms que porte la liste de la Faculté des lettres, il y en aurait bien 300 à rabattre. Mais, même en admettant cette réduction, qui ne paraîtra nullement excessive à ceux qui savent comment les choses se passent dans nos facultés de médecine et de droit, il reste encore un bien beau total : 400 étudians ; la Sorbonne ne s’était jamais trouvée à pareille fête.

Jamais non plus, et c’est ici que les chiffres deviennent véritablement éloquens, jamais nos facultés n’avaient fait recevoir à nos diverses épreuves autant de leurs candidats. L’an dernier, à l’agrégation de grammaire, sur 33 admis, 11 boursiers ; à l’agrégation d’histoire, sur 17 admis, 7 boursiers, dont le premier, le quatrième, le sixième, le huitième, le neuvième et le dixième. 1 l’agrégation des lettres, le succès n’a pas été tout à fait aussi brillant pour 1884 ; 4 boursiers seulement ont été reçus. Mais, en 1883, il y en avait eu 7 dont 3 dans les 10 premiers. A l’agrégation des sciences naturelles, la Sorbonne a eu, l’an dernier, les deux premiers, à celle de physique, le second. Bref, sur toute la ligne, sauf en mathématiques, nos facultés, — celles de Paris, bien entendu, — sont en train de disputer et peut-être à la veille d’enlever à l’Ecole normale sa vieille suprématie. Jadis, c’est à peine si leurs candidats osaient se présenter à la licence du mois d’août ; aujourd’hui c’est le plus difficile et le plus important de nos examens qu’ils affrontent et qu’ils passent haut la main.

Voilà, certes, de bien grands changemens et des résultats qui font honneur non plus seulement, cette fois, à l’administration, mais au corps enseignant, et, pour tout dire, à la faculté des lettres de Paris.