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d’alliances et de combinaisons commerciales qui pouvaient, selon les circonstances, favoriser ou gêner nos constans efforts de ce côté, observer la république polonaise : si elle acquérait un port, elle pouvait s’entendre avec les villes de la Hanse et avec l’Espagne pour prendre sa part du commerce des Flandres. Les Moscovites n’étaient pas encore redoutés ; cependant, les royaumes du Nord commençaient à voir en eux des voisins suspects et génans, et ils occupaient d’importantes routes de commerce. S’il arrivait, comme on le croyait assez probable, qu’avec l’aide des Cosaques la Pologne les attaquât, on n’était pas éloigné, à Stockholm, de songera faire cause commune avec cette dernière puissance, afin d’acquérir entre la Finlande, possession suédoise, et l’état moscovite une bande de terre jusqu’au golfe d’Arkhangel. Par une suite de canaux réunissant les nombreux lacs, on ouvrirait de là une route aux marchandises de la Russie septentrionale vers le port suédois de la Baltique, Revel, et l’on devancerait ainsi dans la voie commerciale les Hollandais, qui ne communiquaient avec Arkhangel que par une longue navigation au nord du continent européen.

Le complot suivant, tramé en 1638, s’il faut en croire les Mémoires rédigés et publiés par Linage de Vauciennes d’après les dépêches de Chanut, montre sous un jour saisissant de quelles ambitions et de quelles luttes commerciales la Baltique pouvait être alors le théâtre. Ces Mémoires assurent que l’Espagne et le Danemark, de concert avec le duc de Holstein, avaient résolu d’en finir avec le commerce rival de la Hollande. Ils se proposaient de mettre la main sur la Suède, et d’exclure entièrement du Nord les vaisseaux hollandais. Pour accaparer le trafic du Levant, ils avaient imaginé de détourner le commerce des soieries avec la Perse en ouvrant à ce négoce un chemin plus rapide et plus sûr à travers les états du grand-duc de Moscovie, limitrophes de la monarchie persane. On se serait servi, pour amener les marchandises, des diverses rivières qui affluent à la Baltique ; on aurait ensuite, par un canal creusé à travers le duché de Holstein, évité le détroit du Sund, qui oblige à un assez long circuit : c’est précisément l’entreprise que l’empire d’Allemagne poursuit de nos jours. Déjà, paraît-il, on se mettait à l’œuvre pour cette communication nouvelle entre l’océan et la Baltique ; une ambassade était reçue amicalement en Perse, et les ambassadeurs, au retour, achetaient du grand-duc de Moscovie pour une grosse somme annuelle le transit par ses états. Il ne restait plus à obtenir que le passage à travers la Livonie, que détenaient les Suédois… Une victoire de l’amiral Tromp sur la flotte espagnole, envoyée au roi de