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caractère intact, sa physionomie distincte, et à rester sur son propre terrain, plusieurs réflexions peuvent s’opposer à la réunion des deux risques. D’abord les modes d’appréciation des risques mobiliers diffèrent sensiblement et donnent lieu à des appréciations variables qui rendraient l’administration plus difficile qu’elle ne l’est actuellement et imposeraient des charges trop grandes : de plus, la jonction des risques mobiliers et immobiliers créerait des responsabilités en cas de sinistres qui dépasseraient toutes les bornes de la prudence, et la compagnie ne pourrait se charger d’assurer des sommes aussi fortes. Il faudrait diviser les risques entre plusieurs sociétés; en outre, l’assurance des risques mobiliers se faisant toujours à un taux plus élevé que celle des risques immobiliers, le renom du bon marché de la Société mutuelle en serait très atteint. Enfin, il faut reconnaître que, dans le fonctionnement de ses opérations, c’est grâce surtout aux recours exercés que le coût des sinistres est relativement faible pour les associés de la Mutuelle : or ces recours, qui proviennent de la responsabilité exercée contre les auteurs des sinistres eux-mêmes, les locataires, les voisins, etc., sont le plus souvent payés par les Compagnies qui leur assurent elles-mêmes, avec les risques mobiliers, certaines sommes en prévision des droits des propriétaires; ces compagnies y trouvent sans doute leur avantage, mais la Compagnie mutuelle en profite dans la plus grande mesure, et en ce cas comme dans bien d’autres, il faut préférer le connu à l’inconnu, c’est-à-dire le recours à l’assurance mobilière.

Une dernière question se présente. La Compagnie mutuelle ne peut-elle étendre le champ de ses opérations, c’est-à-dire assurer des immeubles hors Paris même, ou s’associer à des compagnies mutuelles qui exercent déjà la même industrie ailleurs? Sa propre histoire et les faits récens démontrent qu’elle aurait tort de l’entreprendre. Une société mutuelle ne se fonde pas aisément, il a fallu bien des années à la Mutuelle de Paris pour atteindre son entier développement, il lui reste encore de grands progrès à faire, et nous croyons qu’elle n’a besoin pour le moment que de continuer son œuvre et de se distinguer, comme elle le fait depuis si longtemps, par la rigueur de sa gestion, l’excellence de sa direction et l’honorabilité d’une administration qu’on peut dire désintéressée, comme l’est son association elle-même.


IV.

Quoique très incomplets, les chiffres que nous avons produits, les réflexions qu’ils ont fait naître, les observations qu’ils ont