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l’enseignement artistique contemporain. Il a eu l’honneur d’en résoudre quelques-uns. Imbu de tout ce qu’il y a de respectable dans les principes anciens, ouvert à tout ce qu’il y a d’ingénieux dans les tendances les plus modernes, il n’est étranger à rien de ce qui peut élever le niveau de l’art dans notre pays et sait, mieux que personne, par combien de ramifications secrètes, visibles cependant pour les clairvoyans, l’art noblement entendu se rattache au développement même de la société contemporaine.

Ce n’est donc pas un mince éloge pour M. Allouard que d’avoir mérité de telles louanges ; ce n’est pas non plus un mince mérite pour l’artiste que de nous avoir fourni une figure définitive de Molière, ce Français, le plus Français peut-être de tous, artiste, philosophe, dramaturge, prosateur incomparable, mourant pour son art et par son art avec la sérénité des grands esprits.

Le marbre est bien employé quand il sert à perpétuer les traits de ceux qui ont conquis dans les lettres, dans les sciences, dans les arts un rang élevé, et M. Guillaume nous a donné au Salon de cette année, dans deux bustes d’une exécution magistrale, le portrait de J.-B. Dumas et le portrait de Paul de Saint-Victor. Il était presque impossible de choisir deux modèles plus contradictoires et pour le rendu desquels plus de souplesse fût indispensable.

Le front large, la figure ouverte et accueillante, les yeux doux et profonds, l’attitude réfléchie, mais simple, du savant infatigable et toujours souriant, nous retrouvons tout cela dans le buste de J.-B. Dumas avec le souvenir de ce grand homme d’études, qui savait rester si affable et si bienveillant.

L’apparence un peu hautaine, la tête légèrement inclinée vers la gauche, mais toujours droite, la moustache fièrement retroussée, un peu de cette morgue castillane qui n’enlevait rien à la finesse du sourire, avec la mémoire d’un styliste fier de son art, nous avons retrouvé tout cela aussi dans le portrait de Paul de Saint-Victor.

Il serait facile de relever au Salon une série de bustes excellons exécutés par des maîtres sûrs d’eux-mêmes. — M. François Coppée par M. Delaplanche ; le docteur Evrard par M. Tony Noël ; M. Emile Augier par M. Franceschi ; M. Antonin Proust par M. Rodin ; Picard par M. Félix Martin ; M. Harpignies par M. Hiolle ; M. Marmontel par M. Barrias ; Mme Benjamin Constant par M. Marqueste ; M. Félix Faure par M. Longepied. Facile aussi, parmi les bustes symboliques, de noter une série d’ouvrages intéressans : la Tête d’étude de M. Claudel, la Fille d’Eve de M. Etcheto, la Béatrix et l’Ophélie de M. Léonard. Il conviendrait encore d’ajouter à cette nomenclature quelques bons portraits dus aux ciseaux moins expérimentés de